COLLECTION
La "galerie d'images"
"J'ai très à coeur que les gens apprennent à connaître la Bible et vivent avec elle."
Un local dans un immeuble de Bachenbülach recèle un trésor très particulier : environ 2000 images en couleur et en noir et blanc reproduisant des scènes bibliques de la grandeur d'un poster, des reproductions collées sur des rouleaux ou sur un grand carton. Elles étaient utilisées comme matériel d'enseignement à l'école de dimanche jusque dans les années 60 du siècle dernier. Active pendant de nombreuses années au service des communautés de l'EEM, Elisabeth RUSSENBERGER collectionne ces images depuis plus de trente ans. Elle a été interviewée cet été par Andy SCHINDLER-WALCH et cette interview est parue en allemand dans la revue " Kirche & Welt" numéro 16 du 8 août 2002. La traduction a été faite par Jean-Philippe WAECHTER.
Elisabeth RUSSENBERGER devant une partie de sa collection
AS : Comment vous est venue l'idée de collectionner ces images?
ER : Je n'étais pas méthodiste à l'origine. Quand j'ai commencé mon ministère à Vevey en 1967, j'ai trouvé dans le bâtiment de l'Église une trentaine de ces images en grand format avec des scènes bibliques. Elles m'ont plu et je me demandais pourquoi elles avaient été déposées ici dans le grenier. C'est ainsi que je les descendis dans le local des jeunes pour les nettoyer. Sur ce, je me suis dit qu'il devrait y avoir encore plus d'images, non seulement à Vevey, mais encore dans d'autres paroisses.
AS : Comment avez-vous trouvé d'autres images?
ER : J'ai appelé mes collègues pasteurs et les administrateurs et suis allée de paroisse en paroisse. C'est ainsi que d'autres images se sont ajoutées au lot, et quand j'ai été mutée à Schaffhouse en 1983, j'emportais déjà 700 images avec moi. De 1990 à 1998, j'ai été affectée à la paroisse de Zurich 8 - Inselhof. A cette époque-là, je commençais à numéroter et à cataloguer systématiquement les images. En conversant avec des collègues pasteurs plus âgés, j'ai appris qu'on utilisait autrefois ces images très fréquemment à l'école de dimanche. On les appelait "La grande galerie d'images "ou "la vieille galerie d'images". Plus j'assemblais d'images, plus j'étais enthousiasmée. Je les utilisais souvent lors des cultes, des études bibliques et dans l'instruction religieuse. Non seulement les images sont captivantes, mais les textes accolés aux images sont très intéressants.
AS : Pourquoi la collection s'appelle-t-elle la " galerie d'images"?
ER : On pensait qu'en faisant défiler des images devant le spectateur toute la Bible apparaissait comme une grande galerie d'images.
AS : Comment travaillait-on avec ces images?
ER : J'ai parlé à ce sujet avec des moniteurs et monitrices d'école du dimanche plus âgés. Chaque dimanche, une image était prévue en rapport avec la leçon du jour. Les images arrivaient par la poste sous forme de rouleaux; en plus il y avait un livret d'accompagnement: "les leçons de l'école du dimanche". D'abord on traitait la leçon, ensuite seulement on avait le droit de découvrir l'image, une façon d'éviter que les enfants ne se distraient avant l'heure. Les images étaient fixées sur un support comme pour un "Flipp-Chart" (NDT : un chevalet de conférence) et chaque enfant pouvait feuilleter une image de plus chaque dimanche. Quand un enfant était attentif et avait retenu par exemple le contenu de la dernière leçon, il recevait en cadeau l'image en format réduit, "la petite galerie d'images", ou comme on disait: "ein Fleissbildchen" (une petite image pour enfants appliqués).
AS : Quel était le but de ces images?
ER : Ce n'était pas en premier lieu la diffusion d'images culturellement belles, mais la diffusion du texte biblique. On était convaincu que sans une connaissance approfondie de la Bible, on ne pouvait guère vivre correctement sa foi chrétienne.
AS : N'a-t-on employé ces images que pour les enfants?
ER : Non, également pour les adultes, par exemple en Amérique, Angleterre, Italie, etc. En Suisse, elles étaient utilisées avant tout à l'école de dimanche, mais aussi dans les cours d'instruction religieuse et dans les études bibliques.
AS : Un mot sur l'histoire de ces images!
ER : Les images sont apparues entre 1865 et 1921. L'acheminement des images depuis l'atelier du peintre jusqu'au "bon pour le tirage" prenait habituellement douze ans!
AS : Pourquoi douze ans?
ER : Tout le processus durait parfois encore plus longtemps. A cette époque, il n'y avait pas d'avions ni de moyens de transmission rapides à l'échelle mondiale. Les peintres, en majorité originaires des USA et des pays européens, devaient soumettre leur image au jury de la fédération mondiale des écoles du dimanche. Celui-ci décidait alors si les images convenaient. Il y avait des critères pour ces images, par exemple elles devaient être fidèles à la Bible, être proches du texte et ne pas en rajouter. Pour les pays germanophones, ces images venaient alors jusqu'à la maison d'édition Anker à Dresde où on rajoutait le texte, puis repartaient à Cincinatti aux États-Unis pour l'impression. De là, elles étaient réexpédiées selon la langue dans les pays correspondants. Chaque année, quatre rouleaux de 13 images étaient ainsi réalisés.
AS : Pourquoi n'y a-t-il plus eu aucune nouvelle image après 1921?
ER : Après la Première Guerre Mondiale (1914-18), il y avait un grand manque de papier. A quoi s'ajoute l'importance du stock d'images disponibles. En outre, le jury ne pouvait pas travailler pendant la guerre et n'avait pas été renouvelé.
AS : Qui en principe a été à l'origine de ces images?
ER : Je n'ai pas découvert jusqu'à maintenant qui en était l'initiateur. Probablement qu'il n'y en avait pas. Je pense qu'on doit en chercher
l'origine en Europe. J'ai aussi des images avec un texte suédois ou espagnol. Je poursuis mes recherches sur cette question.
Des images qui "parlent" de la Bible...
AS : Qu'est-ce qui vous frappe personnellement dans ces images?
ER : La Bible. L'histoire biblique me fascine. Cette diversité, cette richesse qui mène de la Création à l'Apocalypse en passant par les prophètes, les Psaumes et les Évangiles. Ça correspond exactement à ce que j'ai vécu en tant qu'enfant. Mon père était missionnaire. Il a raconté non seulement les histoires classiques aux Chinois, mais aussi présenté tous les Psaumes et une partie des prophètes, etc. Et la "galerie d'images" reflète parfaitement cette histoire. Depuis des années, je m'inquiète de ce que les gens ne lisent pratiquement plus la Bible. Plusieurs ne connaissent rien de plus de la Bible que ce que le pasteur lit du haut de la chaire le dimanche.
AS : D'où cela vient-il?
ER : Je pense surtout de la paresse. Les gens lisent certes beaucoup de livres et de revues et racontent qu'ils ont entendu ces histoires au cours de l'instruction religieuse. Mais ils ne lisent plus les histoires. Je suis convaincue qu'un chrétien qui lit régulièrement la Bible vit une transformation de sa personne. Lire soi-même la Bible c'est totalement différent que de se la faire raconter. Il faut considérer que depuis longtemps déjà tous les enfants ne viennent plus à l'école de dimanche et à l'instruction religieuse. Il est nécessaire d'apporter le message biblique tel qu'il est écrit aux femmes et aux hommes de notre temps. J'ai très à coeur que les gens apprennent à connaître la Bible et vivent avec elle.
Interview : Andy SCHINDLER-WALCH
Kirche und Welt N°16, 8 août 2002
NDLR : S'il devait encore subsister l'une ou l'autre reproduction de ces images dans les greniers des Églises Méthodistes en France, veuillez en informer Elisabeth RUSSENBERGER (Mettlenstrasse 43, 8193 Eglisau, Tel. : 0041 1 867 57 22).