Calvinistes et écologistes même combat ?
Luc Olekhnovitch, pasteur
L’écologie et le calvinisme partagent le même combat quand ils luttent contre le consumérisme aliénant et pour la protection de l’être humain. Démonstration par le pasteur Luc Oleknovitch.
Le dernier remaniement ministériel français semble avoir sonné le glas de l’écologie comme priorité politique. Priorité à l’économie, à l’emploi, à la relance par la consommation !
Face à la crise, l’écologie serait-elle un luxe de nantis ? Ce serait oublier que ce sont les plus pauvres des pays pauvres qui sont les plus touchés par les catastrophes environnementales.
Et la consommation ? Est-elle la réponse à la pauvreté de et dans nos sociétés d’abondance ?
Un ami m’a envoyé cette photo piquante où l’on voit une affiche du parti des Verts genevois détournée par des contradicteurs qui taxent cette affiche écologiste de calviniste, car elle s’oppose à l’extension de l’ouverture des magasins ! C’est de l’humour genevois ! Ces contradicteurs ont du toupet : c’est plutôt le travail le dimanche qui peut se révéler nuisible à la santé ! Mais si l’on va plus loin, cette affiche détournée dit peut être une vérité cachée.
© Fleurus, Ton bonheur, c’est quelqu’un, Éditions des Béatitudes
Calvin écologiste ?
Calvin est évidemment partisan du respect du sabbat auquel il reconnaît un rôle social : offrir aux hommes un « répit dans leur labeur ». Mais il montre aussi un refus de comportements démesurés et abusifs et un souci des générations futures qui rejoint bien des préoccupations écologiques actuelles : « Laisse celui qui possède un champ récolter les fruits de manière à ce que le sol ne soit pas endommagé par sa négligence. Laisse-le remettre sa terre à sa descendance dans l’état où il l’a prise en charge, voire en meilleur état… Plus encore : que la responsabilité et le soin soient présents dans tous nos actes qui touchent les dons précieux que Dieu nous donne… Ainsi, personne n’aura de comportement démesuré et abusif face aux choses que Dieu tient à conserver. »
Vivre sobrement justement et saintement
Calvin appelait à vivre « sobrement, justement et saintement en ce siècle » mais il s’opposait à l’ascétisme. Il serait d’accord avec Eva Joly : l’écologie, ce n’est pas de prendre une douche froide dans le noir ! Calvin aurait donc acquiescé au slogan écologiste « sobriété heureuse » ! Mais vivre sobrement, pourquoi ? Pour qui ? L’absence de moteur spirituel prive cet appel de force. La déclaration de Lausanne donne une réponse claire à ces questions : « Ceux d'entre nous qui vivent dans l'abondance acceptent comme un devoir de vivre plus simplement pour contribuer plus généreusement à l'évangélisation et à l'aide aux déshérités. » Voilà une façon de vivre sobrement justement et saintement ! Reste aux évangéliques à la mettre en pratique…
Consumérisme et protection
Les évangéliques et les écologistes en Occident se sont souvent opposés sur des questions d’éthique familiale ou sexuelle. Mais cette opposition n’est pas une fatalité. A preuve la candidate verte Marina Silva à l’élection présidentielle brésilienne. Marina Silva a fait partie du gouvernement Lula, elle a eu le courage de s’opposer à la déforestation avec une certaine efficacité, et en vain au développement des monocultures pour agro-carburant et aux cultures OGM. Or Marina Silva, de gauche et écologiste, est aussi membre d’une Église pentecôtiste et opposée à l’avortement. Le souci de l’environnement devrait inclure la protection de l’être humain. Si l’écologie reste « verte et sérieuse » comme disait le slogan, les héritiers de Calvin et les écologistes ont un combat commun contre un consumérisme aliénant et contre la cupidité qui fait de notre terre un enfer pour les pauvres.