Soldats de Jésus
Linda Caille est partie à la découvertes des Évangéliques en France. Son livre rend compte de son enquête fouillée sur le terrain.
Linda Caille, Soldats de Jésus — les évangéliques à la conquête de la France, Fayard, 2013, 224 pages, 17.00 €
Linda Caille, journaliste, est partie à la rencontre des évangéliques français. Pendant cinq ans, dans les petites communautés comme dans les « megachurches », elle a partagé la vie de multiples missionnaires aux mille visages.
Donnant la parole à des jeunes militants, mais aussi à des dirigeants évangéliques pour mettre en lumière leur stratégie de conquête, Linda Caille nous propose une immersion dans l’univers insoupçonné des évangéliques.
Selon Henrik Lindell (La Vie), son « enquête sur ces chrétiens convertis et militants si méconnus est fouillée et nuancée ». L’intensité des sentiments qu’expriment ces passionnés de Jésus n’échappe pas à Linda Caille.
« Les évangéliques sont solidaires les uns des autres, ils s’entraident pour les déménagements, les gardes d’enfants, des prêts de voitures, etc. Ils créent du lien social, ce dont la société française n’est plus capable.
Mais cette disponibilité et cette spontanéité ont un prix. Chez les évangéliques, le contrôle est collectif, on se mêle souvent de votre vie privée. Le pasteur peut être omniprésent et intrusif. Certes, leurs cultes sont débridés avec de la musique contemporaine, des guitares électriques et une batterie, mais leur doctrine conservatrice est verrouillée. Chez les réformés et chez des catholiques, c’est très différent : la liturgie peut être aux cordeaux, mais on ne se mêle pas de votre vie privée. »
Extrait de l’interview accordée à la Vie par Linda Caille le 21/02/2013.
Brève interview réalisée par JP Waechter
ENroute (ER) : Une façon de faire une radioscopie du courant évangélique?
Linda Caille (LC) : C’est ça…
ER : Unique en son genre, multiple dans la réalité ?
LC : Il connaît une croissance unique en France. En 1950, ils étaient 50 000 et aujourd’hui en 2013 ils sont 600 000. Une croissance unique qui n’a pas son équivalent ailleurs. Dans cette enquête, j’ai fait une immersion dans ce phénomène qui est à la fois social et spirituel.
ER : Divers, homogène ?
LC : Comme tous les protestants, c’est divers : il y a plusieurs mouvements, plusieurs familles, mais tous prônent la conversion, tous sont conservateurs sur le plan éthique, dans les questions de la famille et de la morale.
ER : Progressistes sur le plan social, j’entends sur les questions économiques, politiques ?
LC : Le dernier sondage IFOP montre que 47 % sont à gauche. On est sorti de ce clivage réformés/libéraux de gauche et les évangéliques à droite.
ER : Ce qui compte probablement, c’est cette dimension spirituelle ? le fait de s’enraciner dans la parole d’origine, l’Écriture Sainte sans crispations ? Vous avez trouvé des Évangéliques bornés ou souples ?
LC : Ça dépend de ce qu’on entend par bornés ou souples ! Mais c’est vrai que pour eux la lecture de la Parole de Dieu est quelque chose de sérieux et on ne plaisante pas avec ça. Et c’est vrai qu’ils ont tendance plus que les Luthériens et les Réformés à faire une lecture littérale. Mais je pense que c’est aussi une des raisons de leur succès, cette façon de cadrer et d’avoir des convictions sociales, éthiques, familiales conservatrices qui fait qu’ils ont du succès et en particulier auprès des plus jeunes.
Interview réalisée en septembre 2013 à l’occasion de Protestants en Fête.