Chanter, rouler à moto et pratiquer les danses cambodgiennes
Professeur de musique originaire de Genève, Priscilla Nussbaumer enseigne actuellement à l’école méthodiste de Siem Reap, au Cambodge. Elle fait part à Nicole Gutknecht de ses sujets d’étonnement et de réflexion.
Nicole Gutknecht
Une mission de courte durée
Nicole Gutknecht (NG) Chère Priscilla, tu vis et travailles depuis presqu’un an au Cambodge. Que signifie pour toi : vivre au Cambodge ?
Prisca Nussbaumer (PN)… Une vie pleine de légèreté et de chaleur ; au sens propre comme au sens figuré…. Ce n’est que du bonheur.
NG Une journée de travail typique – comment cela se passe-t-il ?
PN Ce n’est pas très différent d’une journée de prof de musique en Suisse. En général, la journée, je donne des leçons de musique aux petits dans les jardins d’enfants. Le soir, je vois quelques jeunes de l’église qui veulent faire de la musique ensemble, et j’ai encore çà et là des leçons individuelles de piano, de guitare et depuis peu, de violon (!)… et en plus, des cours d’anglais et d’espagnol. Je me déplace beaucoup d’un lieu à l’autre pour enseigner (et la moto, élément essentiel dans la vie d’un Cambodgien m’est donc devenue indispensable…) Mais n’allez pas croire que je sois trop occupée ! Je m’adapte volontiers au rythme cambodgien… Vous connaissez ce dicton d’Afrique qui dit « Vous, vous avez les montres, nous, on a le temps… » Ici, c’est pareil…
La grande différence avec la Suisse, c’est l’accueil que me réservent les enfants quand j’arrive : tout plein d’enfants qui se ruent autour de moi pour me dire « hello » avec des étoiles plein les yeux… Il faut l’avoir vécu pour connaître une joie pareille.
Et puis le plaisir qu’ont tous mes élèves, petits et grands, à faire de la musique, à chanter, jouer, danser, à apprendre. Simple et authentique, un pur bonheur !
NG Qu’est-ce qui te reste étrange même après dix mois au Cambodge ?
PN Les Cambodgiens, qui rentrent et sortent de la maison, comme si c’était un moulin à vent. Chez moi, parmi mes colocataires, il y a une Cambodgienne dont sa famille n’habite pas loin. Elle a 11 frères et sœurs, et je les vois régulièrement défiler sans même savoir vraiment qui ils sont (il y en a trop…). Et ils viennent souvent prendre une poêle, une boisson dans le frigo, etc. C’est toujours assez surprenant et ça me fait beaucoup sourire. Notion de la propriété, valeur suisse ô combien sacrée, ici, ça n’existe pas.
Plus sérieusement, ce à quoi il est assez difficile de s’habituer, ce sont les enfants, le soir, dans les rues de Siem Reap envahies de touristes, avec des sacs-poubelles pour faire de la récupération de déchets ; une image qui dérange mais dont la réalité est quotidienne.
Et puis, il faut savoir que Siem Reap est une des villes les plus touristiques du monde. L’argent coule à flots, et c’est pourtant la seconde province la plus pauvre du pays. Car l’argent n’arrive pas aux mains de ceux qui en auraient le plus besoin, mais va tout droit dans les poches des plus riches, expatriés installés au Cambodge ou grandes compagnies internationales ayant investi ici… J’essaye toujours d’acheter à manger aux petits marchands ambulants dans les rues pour remédier à cela. À peine une goutte d’eau…
NG Qu’est-ce que tu vas emporter de ce stage ?
PN Des milliards de sourires, les yeux des enfants qui brillent en chantant, simplicité, légèreté, générosité, le plaisir d’un jus de noix de coco, la douceur de la lumière du soir, et tant d’autres magnifiques choses… Mais aussi une nouvelle conscience des inégalités Nord Sud, un malaise face à trop d’injustices et de l’humilité quant à ces situations si difficiles vécues par la plupart des Cambodgiens.
Un engagement de courte durée à Connexio, qu’est-ce à dire ?
Connexio, le réseau pour la mission et la diaconie de l’EEM, propose, en collaboration avec des Églises partenaires des engagements de courte durée à des personnes entre 20 et 30 ans.
Vous travaillez de 2 à 13 mois dans un projet ou au service d’une communauté et vous apprenez ainsi à connaître le travail de l’Église évangélique méthodiste, la culture et la vie dans un autre pays.
Pour plus d’informations à cette adresse :
NG Pour la fin trois mots-clés : à quoi penses-tu quand tu entends…
… Jeunes au Cambodge…
PN Impressionnants, pleins de ressource, pleins d’humour, toujours positifs !
La plupart des jeunes me racontent qu’ils se lèvent à 4 heures le matin pour prendre le temps de lire la Bible. À 5 heures, ils préparent à manger et font le ménage pour les gens de la maison (ça, c’est ce que les filles font, hum !). Après quoi, ils partent au travail pour toute la journée, et finissent en allant aux cours à l’Université le soir de 17 heures à 21 heures. Je ne sais vraiment pas comment ils font pour rester toujours aussi motivés, souriants et engagés…
NG… Danses khmères…
PN Ça dépend de quel point de vue : Pour eux, grâce, subtile et aérien… Pour moi, aïe aïe aïe !
NG… Culte cambodgien…
PN Dynamique, beaucoup de musique, de la joie, animé…