LE MONDE EST MA PAROISSE
3 février 2003
Les responsables d'Église sur la brèche pour plus de paix et de justice :
En Côte d'Ivoire, sur le mode du jeûne et de la prière
Malgré la signature d'un accord à Marcoussis (France), la paix n'est pas encore revenue en Côte d'Ivoire ; ce pays n'est plus ce havre de paix qu'il était précédemment. Luttes et violences perturbent gravement la vie de ses habitants. Les responsables religieux du pays, dont le pasteur Benjamin BONI, président de la conférence de l'Église Protestante Méthodiste, se sont mobilisés au début de janvier pour conjurer par le jeûne et la prière le mauvais sort et implorer la miséricorde de Dieu. Ils sensibilisent la population au fait que «personne ne sauvera notre pays à notre place. Dieu a mis son sort et son avenir entre nos mains». Ils estiment que «cette escalade de violence, de guerre ne nous mène à rien, sinon à notre propre ruine ».
A leurs yeux, les confessions religieuses et plus précisément les chrétiens et les musulmans ne sont pas en guerre. «Depuis des décennies, nous vivons une heureuse convivialité. Il y a sans doute, nous le dénonçons et le condamnons ensemble et publiquement, une utilisation malhonnête et dangereuse de la religion à des fins politiciennes ».
Ils invitent enfin chacun à reconnaître ses erreurs, sa part de responsabilité dans les événements actuels et à prendre des dispositions pour y mettre fin définitivement sans tarder. Ce qui arrive aux Ivoiriens n'est d'après eux pas le fruit du hasard, mais en partie la conséquence «de nos légèretés, de nos complicités, de la culture du laisser-aller, du mensonge, de la corruption, du tribalisme, du désordre, de l'irresponsabilité, du culte de l'argent, de la réussite facile, des honneurs, du pouvoir coûte que coûte, des calculs pervers et de l'opportunisme que nous avons entretenus des décennies durant et que nous entretenons encore ».
Dans son message du nouvel an, le pasteur Benjamin BONI a asséné le même message. «En ce début d'année nouvelle, par rapport à notre couple, notre famille, nos communautés religieuses, nos associations, notre nation, quel comportement d'objet direct ou indirect voulons-nous affecter personnellement au verbe faire ?», s'est interrogé le pasteur. Ce message s'adresse à toute la nation, insiste-t-il, invitant à se demander si les faiblesses de Judas ne se retrouvent pas aujourd'hui en nous ; à savoir : l'avarice, le détournement, la duplicité, la vision erronée de la vie, le jusqu'au-boutisme.
Dieu, en ce début d'année, nous interpelle tous devant notre conscience, devant l'histoire, souligne-t-il, égrenant les maux qui, selon lui, ont conduit à la situation présente en Côte d'Ivoire. «Ce sont notre laxisme, notre manque de courage, notre peu d'amour pour la Côte d'Ivoire, nos rackets, pots-de-vin ou dessous de table, nos détournements et corruption, nos clivages sociopolitiques, nos fanatismes religieux, notre manque de dépassement des rancoeurs et l'absence de dialogue franc qui y ont conduit », dit-il. Et il ajoute : «Dieu est en train de restaurer la Côte d'Ivoire, laquelle a besoin pour l'après-guerre d'un type de citoyen nouveau formé dans le creuset des impératifs issus des convictions profondes de la foi et des valeurs morales qui sortent l'homme de l'anonymat et du flou ». Pour l'année nouvelle, il lance alors : « Ce que tu es venu faire, fais-le Si c'est le bien, fais-le. Si c'est le mal, arrête-toi. Change de direction. Oui, c'est à un changement profond que le Dieu de ce pays nous invite, frères et soeurs de Côte d'Ivoire ».
L'appel de l'évêque KLAIBER depuis l'Allemagne
Dans sa lettre pastorale datée du 8 janvier 2002, l'évêque de l'Église Évangélique Méthodiste (EEM) en Allemagne, D. Walter KLAIBER appelle à la mobilisation générale dans la prière. La guerre en Irak semble inévitable, alors qu'on ne peut rien déduire du rapport des inspecteurs en désarmement des Nations-Unies qui justifie une guerre... Tout nous donne à penser que ces inspections, quels que soient d'ailleurs leurs résultats, ne parviendront pas à stopper la machine de guerre lancée par les États-Unis. Et d'ajouter : « Un américain notoire m'a dit franchement : les armes de destruction massive ne sont pas en cause, mais ce sont les rapports de force au Moyen-Orient, il faut qu'ils penchent en notre faveur. » Pour l'évêque KLAIBER, les chrétiens ne peuvent pas se résigner à cette situation :
«Nous disons et redisons non à cette guerre. En cela, nous sommes d'accord avec d'autres Églises chrétiennes en Allemagne comme avec notre Église aux USA. Mais nous pouvons faire plus que de dire non. Nous pouvons et devons prier en faveur de la paix. Et nous le faisons déjà en beaucoup d'endroits. Cependant je voudrais appeler à prier encore plus intensément et de concert avec d'autres en faveur de la paix en Irak, en faveur de ses habitants, en faveur des responsables politiques aux USA, en Irak et à l'ONU et à ne pas cesser de réclamer la paix et la réconciliation en Israël et en Palestine. »
Le cri du coeur de l'évêque PAGURA à Porto Allegre
Le forum anti-mondialisation de Porto Allegre réuni à la fin janvier 2003 n'a pas été déserté par les chrétiens. Par leur présence massive, ils ont dit leur refus du système politique et économique en vigueur et des menaces de guerre. Par ses prises de position, l'évêque méthodiste argentin Federico PAGURA, qui fêtera ses 80 ans en mars prochain, a marqué ce forum. C'est de nos jours une des voix prophétiques les plus fortes qui soient en Amérique latine.
A ses yeux, le nouveau président brésilien LULA, syndicaliste de base parvenu au pouvoir, fait oeuvre d'évangélisation : «Quand le président LULA déclare s'être fixé pour objectif qu'à la fin de son mandat il n'y ait plus au Brésil un seul enfant qui s'endorme en ayant faim, il fait oeuvre d'évangélisation ». Il étaye son affirmation en reprenant la thèse du prêtre uruguayen Luis Pérez AGUIRRE qui disait qu'en Amérique latine l'annonce de l'Évangile passe, en premier lieu, «par un tube d'environ huit mètres de long qu'on nomme appareil digestif ».
Federico PAGURA n'a pas caché ses sympathies pour le Brésil. «J'ai suivi avec intérêt la marche du mouvement des "sans-terre ", la progression du parti des travailleurs, le long cheminement du mouvement oecuménique brésilien qui est parmi les plus vivants et les plus dynamiques et, plus récemment, le développement du forum social mondial qui commence à éclipser le forum économique mondial de Davos. »
Le forum social mondial est «un symbole précieux de cet autre monde possible pour lequel nous luttons », a affirmé l'évêque, se référant ainsi au slogan du forum.
Et pendant que dans le Nord Davos et Washington proposent de nouvelles formes d'exploitation et une guerre insensée, dans le Sud la population de pays comme l'Argentine, le Brésil, l'Équateur ou Cuba démontre « qu'elle manque de tout, sauf de dignité ».
Parlant de l'Argentine, Federico PAGURA a fustigé les «gourous» de l'économie qui, en promettant de faire passer le pays dans le « premier monde » grâce à leurs remèdes miraculeux, ont gravement trompé les Argentins. « Venez visiter mon pays», a ajouté l'évêque, «et les larmes vous monteront aux yeux ».
Federico PAGURA a mentionné aussi d'autres noms dans son témoignage, tels ceux de Martin Luther KING et d'Oscar Arnulfo ROMERO, «figures inspiratrices qui proclamaient un message de vie et d'espérance, sans jamais le séparer de la nécessité de transformer les conditions de vie de leur peuple». Le souvenir de ces deux personnalités lui a permis de renouveler son espérance et de nourrir la foi qui l'a soutenu dans les moments les plus difficiles de sa vie.
Le cri d'alarme de l'évêque Nelly RITCHIE de l'EEM d'Argentine
La situation ne s'arrange pas en Argentine sur le plan économique : beaucoup d'enfants en bas âge et de personnes âgées meurent de faim et le taux de malnutrition est très élevé en Argentine. L'évêque Nelly RITCHIE lance un cri d'alarme non sans mettre en cause l'indifférence de l'occident : «Nous-mêmes, nous nous demandons avec indignation : "Combien d'autres enfants doivent encore mourir en Argentine pour que l'on comprenne la dimension réelle de cette catastrophe ? Combien de manifestants doivent encore être assassinés ? Combien de voix va-t-on encore faire taire, qui défendent la vie ... Et combien de terre doit encore être illégalement saisie... pour qu'on prenne vraiment conscience de cette urgence nationale ? "».
Voilà donc quelques échantillons d'hommes et de femmes de Dieu montés en première ligne pour défendre devant Dieu et les hommes la cause de leurs semblables : depuis les autorités religieuses de Côte d'Ivoire jusqu'aux évêques KLAIBER, PAGURA et RITCHIE, tous «construisent un mur de défense, gardent les murs du pays pour son bien et pour empêcher sa destruction» (Ézéchiel 22,30). Le Seigneur se cherche des intercesseurs dignes de son nom. Serons-nous de leur nombre ?
Jean-Philippe WAECHTER
(EEM DE VARNA, BULGARIE)
La nouvelle Église Évangélique Méthodiste à Varna en Bulgarie vient d'être inaugurée le 29 septembre 2002. Après des temps difficiles et de nombreuses tracasseries, l'Église se dresse majestueuse au centre de la ville. Elle nous invite à oublier le passé et à nous tourner avec joie et détermination vers l'avenir. L'architecture moderne et originale de ce bâtiment ne passe pas inaperçue. La croix à son sommet se distingue par sa hauteur, inhabituelle dans notre pays. Les locaux jouxtant l'Église disposent d'un centre socio-culturel, d'un cabinet médical et d'une cantine pour les plus défavorisés.
De nombreuses personnes venues de Bulgarie et de l'étranger assistèrent à la cérémonie d'inauguration. Nous avons particulièrement salué notre évêque Henri BOLLETER, le surintendant Bedros ALTUNIAN, Edy FOX venu d'Amérique, ainsi que les personnalités officielles de Varna et les représentants des Églises évangéliques. Nous avons terminé la fête par un magnifique concert. Un orgue est en voie d'installation, superbe cadeau de nos amis de l'étranger. Nous sommes heureux et reconnaissants envers notre DIEU et garderons de ce jour un souvenir inoubliable.
Adrinée KAZASSIAN, Varna