Courrier des lecteurs


Deux réactions à l’article de Henri Bacher « les intermittents du culte  ». En retour, l’auteur souligne l’influence de la civilisation internet sur notre vie et nos mentalités.

Gare à l’excès

L’article de Henri Bacher intitulé « les intermittents du culte  » part de constatations que l’on ne peut que confirmer :

La désaffection fréquente de jeunes adultes pour les cultes ‘classiques’,

La transition d’une culture littéraire à une culture dominée par l’oralité électronique,

L’importance grandissante accordée aux émotions.

Ces constatations nous interpellent certes et nous invitent à rechercher une adaptation de nos façons de communiquer l’Évangile et de nos pratiques cultuelles à l’évolution de la société pour que le message puisse être entendu et compris par nos contemporains.

Certaines affirmations de Henri Bacher me semblent toutefois excessives.

Est-il juste, en effet, d’accuser la « civilisation du livre  » d’endiguer, de brider les émotions ?

Je sais et je crois, au contraire, que la lecture et la prédication de la Parole de Dieu ont toujours éveillé, et continueront encore à éveiller des émotions, aussi bien que des appels à la raison et à l’action. Ce qui, à mon avis est excessif, c’est d’opposer la culture de l’oralité électronique, de la télévision et de l’internet, à la civilisation du livre et d’accuser cette dernière d’être génératrice de froideur intellectuelle. L’évocation de la Shoah et des deux guerres mondiales pour appuyer cette affirmation me paraît encore plus excessive.

Heureusement que la fin de l’article est plus nuancée. Je peux en effet suivre Henri Bacher lorsqu’il écrit qu’aucune culture ne peut prétendre à l’universalité, et je partage son espérance que « Dieu se fera comprendre aujourd’hui, comme il s’est fait comprendre dans le passé ».

Daniel Husser


Simple écho

… On peut repérer dans certains propos l’amalgame entre émotion et signes d’émotion, qui, poussé plus loin, risque de dissocier « comportement  », observable, et « attitude  », plus intérieure. Notre époque donne la primauté à l' «  animation  », et on peut se demander si nous devons suivre cette exaltation de celle-ci.

Je suis de ceux qui souhaitent des modifications en ce sens, dans les cultes, mais il y a aussi diverses conceptions de l’animation. Ainsi, je ne sais s’il faut mettre les rieurs de son côté – antédiluvienne technique de la rhétorique (amuser au sens d’égayer…) ? Ne vaut-il pas mieux, dans un culte, essayer de faire que chacun puisse rejoindre les points sensibles de son existence, de ses questionnements, et ce grâce à une parole elle-même sensible – et pudique ?

Pour cela il faudrait aussi par ailleurs – je ne sais plus trop où et comment – des moments de réflexion commune, avant de s’en remettre – mais faut-il s’en remettre à eux ? – aux intervenants quasi spécialisés dans la « gestion  », comme on dit, des « émotions  » (si mal définies, car enfin, je peux être ému en restant de marbre, et je serai peu ou pas ému en « me la jouant  » avec un art consommé) ?

Il me semble que la palette émotionnelle est très travaillée dans l’Évangile, mais toujours à nouveau elle se récapitule dans la dimension du témoignage, de la proclamation, dans la parole ultime et ne se réduit pas à une forme ou à une technique d’animation des affects.

Tout ceci en simple écho.

Gérard Fath


Réponse de l’auteur

La tour de Babel est tombée, ni par dissensions internes, ni à cause d'une crise financière ou d'une guerre, mais parce que Dieu a brouillé leur langue. La langue est une partie essentielle d'une culture. Dieu s'est donc attaqué au noyau culturel de cette tour pour la détruire. Pour éliminer ou fragiliser un peuple, détruisez sa culture! Ne prenons donc pas à la légère le changement culturel d'aujourd'hui orchestré par les mass-media, internet et la téléphonie basées essentiellement sur des modes de communications orales (audio, video et images). La civilisation du livre et ses modes de communication, d'apprentissage se fait laminer par les nouveaux venus. Nos «gesticulations» ne feront même pas ralentir l'avancée de ce rouleau compresseur. Les premiers chrétiens à Jérusalem ont vécu une expérience similaire. Leur attachement à la culture des Juifs  a été mis à mal par la culture grecque, véhiculée par les romains. C'est Antioche, situé dans l'univers grec, qui a relevé le défi, pas Jérusalem.
Logoscom vient de sortir, en livre électronique, une compilation d'articles autour de ces thèmes: www.logoscom.org

http://issuu.com/logoscom/docs/eglise_in_future_emergent/1?mode=a_p

Nous poursuivons des expériences très diverses en dehors de nos lignes de force liées à la tranmission de la Bible pour les personnes qui n'aiment pas lire < www.allobible.org >
Je développe actuellement un mini-roman écrit pour être lu sur un téléphone portable. Les lieux dont il est question sont géo-référencés sur Google Maps. J'imagine Jésus circulant entre Genève et Lausanne avec ses disciples:

http://www.allobible.mobi/mini-roman_10.html
Nous venons aussi de lancer une communauté de méditants sur Twitter (toujours dans le domaine de l'oralité électronique): < http://twitter.com/allobible >

Henri Bacher