L’école des femmes
Grégory Luna
Le pédopsychiatre Stéphane Clerget déplore que « l’école n’est plus adaptée aux garçons », vu que le corps enseignant est presque exclusivement féminin dans le primaire et aussi au collège dans une certaine mesure. Cet avis n’est pas partagé par notre chroniqueur.
Enfin… Nous y voilà ! Il y a trop de femmes dans l’éducation ; du moins, c’est ce que nous rabâche la presse depuis l’intervention virile1 du premier ministre britannique sur la question : « Il faut plus d’hommes dans l’éducation […], capables de force et de sensibilité » a-t-il martelé ; « il y a 120 000 familles brisées qu’il faut remettre sur le droit chemin » a-t-il ajouté ; un challenge que les institutrices du Royaume ne seraient pas, selon lui, de taille à relever.
De l’autre côté de la Manche, au grand dam de la majorité parlementaire, le ministre de l’éducation n’est pas de son avis ; il pense, au contraire, que la féminisation de la profession reflète « l’évolution de la société » ; quant à l’autorité, il dira joliment à ces dames : « j’ai la faiblesse de penser que les femmes ont un certain sens de la pédagogie, et de l’autorité, […] » ; mais bon, pour la faiblesse, ce n’est pas la seule ; depuis Jules Renard, tout le monde sait qu’en France, le deuil des convictions se porte en rouge et à la boutonnière.
D’ailleurs, de nos jours, qui oserait crier sur les toits – hormis David Cameron — qu’une femme contemporaine, ou plutôt selon les maux du moment, une femme en devenir, n’est pas capable d’autorité depuis l’émancipation de la femme ? À part Jean François Kahn, je n’en vois pas ; de la même manière, au jeu des z’amours2, qui serait assez étroit d’alléguer, tel un Monsieur de la Souche3, que le bonheur conjugal réside dans la soumission de la femme, qu’il eût fallu pour cela qu’elle soit bigote à l’excès, ou pis encore franchement simplette ? Peut-être quelques fondamentalistes ! Et encore…
Une Bible « ringarde »
Pourtant la Bible ne se tait point sur le sujet. Ainsi donc, si vous êtes inquiets qu’à la rentrée prochaine, dans sept cas sur dix4, vos « petits gars » auront encore une femme comme modèle à suivre, dites-vous que d’autres, s’arrachent d’ores-et-déjà les cheveux quand ils voient dans les manuels scolaires, une dédicace du lobbying homosexuel sur la page sexualité. Comme dirait le chansonnier Robert Rocca : « tout homme a besoin d’une femme, ne serait-ce que parce qu’on ne peut pas toujours se plaindre du gouvernement ».
Soyons sérieux une minute ! Y a-t-il un texte biblique, ou une situation dans les récits de la Bible qui inférerait l’illégitimité d’une femme à l’égard d’un élève garçon ? Ou encore, qu’une éducation exclusivement féminine nuirait au bon développement de l’identité masculine ? Personnellement, je n’en vois pas ; à moins que vous ayez des doutes sur la trempe de John Wesley et ses frères qu’ils devaient en partie à leur mère.
Si notre Bible est « ringarde », c’est que nos préjugés l’ont maculée de sottises ; à force de s’imaginer que le Seigneur est comme nous, on aurait tendance à oublier qu’il est tout autre, et que ses pensées ne sont pas les nôtres. Sincèrement, je crois qu’il est temps pour chacun d’entre nous de suivre le conseil du prophète Esaïe et d’aller acheter gratuitement de l’intelligence au marché de la sagesse. Car voici un temps où si les hommes ne se repentent pas « le peuple aura pour oppresseurs des enfants, et des femmes domineront sur lui ; ô peuple, ceux qui te conduisent t’égarent, et ils corrompent la voie dans laquelle tu marches5 ».
Notes
1 Intervention au lendemain des émeutes étudiantes de Londres en août dernier.
2 Jeu télévisé qui passe tous les jours à 11h30 sur France 2
3 Personnage central de la pièce de Molière « l’École des femmes » caricaturant une société où la misogynie des femmes est très marquée, la relayant à être uniquement l’objet de son mari, sans autorité aucune, juste bonne pour les besoins du ménage, et bien sûr pour assurer la postérité.
4 En 2011, on atteint 91% de l’effectif dans le privé. Et plus de 60% de l’effectif dans le secondaire, publique/privé confondus.
5 Es.3.12