Pastorale à Trient (Suisse) du 2 au 5 mai
"Vous avez dit 'ecclésiologie'... par le pasteur Jean-Ruben Otge
"Temps de partage" par la pasteure Roswitha Golder
"Les bons mots de Michel Weyer" Notes de conférence
Vous avez dit « ecclésiologie »… ?
Pasteur Jean-Ruben Otge
Ces rencontres se voulaient studieuses ; elles l’ont été. Il faut dire qu’en plus des pasteurs en fonction et en retraite (active), étaient invités les étudiants et les stagiaires ; tous (c’est-à-dire 27) en quête de réflexion édifiante. Cela s’est vécu particulièrement lors de nos entretiens à bâtons rompus ou lors des partages de nos expériences sur la manière de préparer et de vivre les culte, étude biblique ou catéchisme ; mais aussi par les méditations enrichissantes apportées par nos amis stagiaires et le culte final.
Le professeur Michel Weyer nous a amenés dans ses réflexions au-delà du plan strictement méthodiste. En parlant d’ecclésiologie, nous abordions les questions relatives à la théologie et à l’organisation de l’Église en tant qu’institution dans la société. Ce thème est peu en phase avec l’air du temps : on renâcle à parler d’institution (au profit de l’événement) ; l’individualisme croît par rapport à la notion collective ; les structures sont dévalorisées par rapport au spirituel ; l’attrait pour l’image détrône le texte. Michel Weyer a insisté sur la nécessité d’être en dialogue avec les autres Églises, « parce qu’une Église ne peut l’être sans les autres » (dans le temps et l’espace) ; « le but est de demeurer identitairement ouvert tout en maintenant ses convictions ».
L’histoire montre que John Wesley a cherché à retenir les points positifs de l’Église Anglicane (de laquelle il ne voulait pas se séparer) et du piétisme (en particulier l’accent sur la nouvelle naissance). L’indépendance de l’Église Méthodiste n’a jamais été appréhendée sous l’angle théologique mais missionnaire. Michel Weyer a souligné le fait d’un déficit doctrinal dans l’ecclésiologie méthodiste, mais cela est ainsi en raison du but primordial qui réside dans la mission.
L’Église que nous désirons être se fonde sur la Parole de Dieu, qui est lue avec les instruments que sont la tradition (il est dangereux de croire posséder la vérité sans l’appuyer sur la foi de nos pères), l’expérience (la foi n’est pas théorique : elle se concrétise dans la vie) et la raison (la foi est éclairée par une lecture intelligente). Dans l’ecclésiologie méthodiste, a souligné notre orateur, un but essentiel est d’être un pont entre les différentes traditions, un pont dont le pilier central est la Réforme.
Oui, certainement il est bon de jeter des ponts, … mais il ne faut surtout pas délaisser le plus important : dresser des échelles.
Temps de partage
Pasteure Roswitha Golder
Après un tour de présentation où tout le monde dit son nom, son affectation, des précisions sur sa famille, etc. Étienne Rudolph demande à 7 personnes de nous parler des réalités de leur ministère selon des thèmes qu’il leur avait attribués auparavant. Les personnes se sont préparées de manière très sérieuse et nous parlent avec beaucoup d’ouverture et d’honnêteté des joies, mais aussi des difficultés vécues.
Mutation
On commence par la mutation, une pratique courante de l’EEM qui n’est pas toujours vécue de manière agréable. Claude Grunenwald qui nous en parle a changé de poste 4 fois en 20 ans. Pour lui en tant que pasteur, cela se passe plus facilement que pour son épouse. Ils vivent ces expériences comme une transformation et un enrichissement en se souvenant qu’elle est une constante du peuple de Dieu en marche en commençant par Abraham et d’autres qui ont reçu l’appel de Dieu. Il faut être prêt à dire : «?Le Seigneur peut disposer de moi? », ce qui ne va pas de soi, mais est un acte qui libère et nous fait vivre ces changements d’une manière plus calme et confiante.
Famille
Jean-Ruben Otge nous parle de sa famille. Il vit cette relation comme un privilège et non pas comme une charge additionnelle. Il a grandi dans une famille de pasteurs et son épouse partage l’optique d’un ministère pastoral qui engage toute la famille. Dans ce sens, les enfants ont l’expérience d’un accord pris en commun. Le temps est un facteur avec lequel il faut apprendre à jongler. On prend par ex. le jour de congé le mercredi pour le vivre avec les enfants. On n’a pas de répondeur et on ne répond pas au téléphone durant les repas.
Collégialité
René Lamey nous parle de son travail dans une équipe pastorale suite à la mise en commun des deux églises à Strasbourg. C’est une première pour lui et il trouve que cela a beaucoup d’avantages, mais il faut arriver à avoir une vision commune, du respect pour l’autre. Cela peut devenir un piège si l’on se fait l’oreille attentive au mécontentement des paroissiens qui déposent des plaintes sur le collègue.
Conflits
Robert Gillet nous parle des conflits. Il a vécu une situation difficile pendant six ans en y travaillant de manière théologique avec l’aide d’un guide spirituel. Il a appris six leçons :
• Faire des concessions, des pas vers l’autre,
• Voir l’autre comme frère/sœur en Christ même quand on n’est pas d’accord avec lui/elle.
• Il faut sans cesse se remettre en cause soi-même, rétablir sa propre relation à Dieu, recevoir pardon et consolation de Dieu,
• On peut arriver à vivre une communion, même si les différences ne sont pas résolues.
• Il faut accepter la défaite, sans amertume, sans rancune.
• La solitude est présente, la guérison peut être longue.
Débuts
Étienne Koning nous parle des débuts de son ministère. On est obligé de tout mettre en route dans un nouveau cadre, dans des endroits qu’on n’a pas forcément choisis. Une des choses les plus difficiles est l’organisation de son temps, entre les réunions, leur préparation, les affaires courantes, les visites, la vie personnelle, de couple et de famille ! Il n’est pas non plus évident de gérer son nouveau statut, en tant que pasteur : est-ce qu’on choisit plutôt un style collégial ou est-ce qu’on doit être la locomotive ? En fait, il est important de trouver un bon équilibre entre le travail en équipe et la responsabilité que le pasteur peut avoir, de donner des impulsions et de suggérer des orientations, lorsque cela est nécessaire.
Temps partagé
Claire Lise nous parle de la gestion d’un temps partagé. Elle fait un mi-temps dans une paroisse et un autre dans un ministère spécialisé de relation d’aide. Il est plus difficile d’avoir du temps pour soi et pour son couple. Il faut apprendre à jongler autrement. Elle est très contente de son action ponctuelle, personnelle, dans le cadre de la relation d’aide. Ce sont des clients qui veulent changer des choses dans leur vie. Ils viennent avec un projet, parce qu’ils ressentent le besoin. Elle fait de la théologie pratique et apprécie d’être suivie par une supervision.
Les bons mots de Michel Weyer
Notes de conférence
L’Église
L’Église est la servante de la parole de Dieu, ses ministres sont essentiellement des prédicateurs de cette parole. Cette parole devient un vis-à-vis critique de cette église qui doit se soumettre à la critique et à la discipline de cette parole.
La Réforme
Les Églises de la Réforme parlent de préférence de Dieu, de son Christ et d’un Évangile qui interpelle, justifie le pécheur et l’église. Ekklesia semper reformata reformanda, l’Église est toujours sujette à des réformes. La Réforme a été une puissante contestation de la tendance très ancienne à une objectivation croissante des choses de Dieu qui avait conduit à une domestication eccclésiastico-juridique et à une réification de la grâce inconciliables avec le cœur du message biblique. La Réforme a protesté contre la tendance à chosifier la spiritualité, réifier Dieu. On avait fait de l’église une institution qui gère le salut. La Réforme s’était élevée contre cette forme de mystique.
L’idée du méthodisme
L’idée de Wesley, c’était de créer un ordre de laïcs zélés et disciplinés vivant prophétiquement une vie communautaire intégrée à une église anglicane «méthodisée » progressivement, d’où l’élaboration progressive et pragmatique de tout un système de groupes de laïcs mis au service de l’évangélisation, de la cure d’âme, de la sanctification privée et sociale, ainsi que de l’approfondissement de la foi chrétienne.
Prophétie et ordre établi
Le méthodisme se veut agitateur, prophétique. Alors se pose la question de notre existence d’église, tournée vers les autres églises : telle est notre fibre naturelle, ne pas quitter la famille pour mieux déranger et appeler à la vie sainte… Ne pas quitter notre communauté d’origine, ainsi voulons-nous vivre et mourir… Alors pourquoi John Wesley a-t-il franchi le cap en nommant des évêques et créé une église méthodiste séparée ? Et aujourd’hui quelle est la place de la parole prophétique ? L’appel à la vie sainte au sein d’une communion… ou la contestation est-elle condamnée à la rupture faute de pouvoir s’exprimer librement ?
Connexio
Le principe de Connexio est la structure spécifiquement méthodiste. Être l’église, c’est être en communion avec les autres. Nous n’avons pas une vision congrégationaliste, où chaque église locale serait indépendante. Avec les orthodoxes et catholiques, nous considérons que l’Église est une communion d’églises locales qui fonctionnent en solidarité. Ensemble, elles forment l’église universelle. Connexio est un réseau de relations interactives qui nous permettent de partager la même mission… la même tradition de foi ainsi qu’une même manière de fonctionner. Ce réseau est structuré en un système de conférences. Ainsi tout ce que possède l’église locale est pour le bien de l’ensemble. C’est le fruit d’un consensus international, un acquis à ne pas remettre en question, à corriger si nécessaire là où certaines pratiques ne sont pas conformes à la parole de Dieu.