“Les Jeux Olympiques sous le signe de la répression religieuse” par Henrik Lindell, journaliste
Pour le compte de quatre journaux (Horizons Évangéliques, Christ seul, Pour la Vérité et ENroute), Henrik Lindell revient sur les J. O. de Pékin, rendez-vous sportif sans précédent qui a passionné les foules. Tandis que les athlètes concourent, des chrétiens endurent la répression. Lumière sur la face cachée des J. O. !
Profil bas ! Tel était, en résumé, le mot d’ordre en vigueur chez les chrétiens chinois avant et pendant les Jeux Olympiques à Pékin du 8 au 24 août. Dès l’été 2007, à en croire les responsables de Portes Ouvertes en France, les autorités ont fait savoir aux chrétiens évangéliques en particulier qu’elles seraient spécialement vigilantes à l’égard de tout « débordement » de leur part. Travaillant bien « en amont », les services de sécurité chinois ont ainsi expulsé une centaine de missionnaires étrangers, surtout des pentecôtistes, entre avril et juin 2007. Selon nos informations, plusieurs opérations de distributions de Bibles ont été reportées dans un pays où bien des chrétiens nouvellement convertis n’ont toujours pas accès à la Parole de Dieu. Les organisations de défense des chrétiens persécutés, notamment China Aid Association aux États-Unis, ont rapporté plusieurs dizaines de cas de répression. Ont été visées en priorité les Églises de maison qui refusent de se soumettre au contrôle strict du Parti communiste, à la différence de l’Église protestante officielle et de l’Association patriotique catholique1. Des dirigeants de communautés ont été arrêtés dans des provinces comme la Mongolie intérieure, le Xinjiang, le Jiangsu et le Henan. En préparant Noël en décembre dernier dans ces provinces, des dizaines d’Églises de maison ont soudainement reçu la visite brutale des services de sécurité et subi des interrogatoires musclés. Au printemps, la répression a été globalement moins importante et très inégalement répartie. Après le terrible tremblement de terre le 12 mai dans le Sichuan, des groupes évangéliques ont pu distribuer des vivres et des Bibles en toute liberté… Ailleurs, les autorités se sont montrées implacables. Un des derniers cas connus avant les J. O. était la deuxième arrestation en juin de Shi Weihan, propriétaire d’une librairie à Pékin. Il a été accusé d’avoir imprimé des documents religieux « illégalement ». L’homme est surtout connu pour son engagement en faveur des droits humains. Il avait déjà été libéré en janvier dernier après que des médias étrangers ont fait pression sur les autorités. Au moment du bouclage de cet article, le 7 juillet, l’homme était toujours emprisonné.
Si les motifs profonds des autorités sont évidents – le Parti communiste, officiellement athée, a peur de perdre le contrôle sur la société chinoise – il faut comprendre aussi ses contradictions internes. Le Parti communiste compte de plus en plus de croyants, notamment des chrétiens2. Il va donc évoluer, du moins idéologiquement. Il sait aussi, mieux que nous, que les chrétiens évangéliques sont plus nombreux que les catholiques et les protestants des églises officielles réunies (autour de 80 millions, selon des estimations moyennes). De facto, sur les trois dernières décennies, il devient de plus en plus tolérant à l’égard des minorités religieuses. Mais, de là à accepter les droits humains en matière religieuse, il lui faut une véritable révolution culturelle. Mais une vraie. Et démocratique.
1. C’est 'l’Église catholique' officielle mise en place par le régime qui ne peut reconnaître l’autorité du Vatican.
2. Lire l’excellent reportage dans Christianity Today de mai 2008 : « Great leap forward ».