“John Wesley et ses relations aux Catholiques”
par le Cardinal Walter Kasper
À l’occasion du 300e anniversaire de la naissance de John Wesley, le Cardinal Walter Kasper, président du Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens depuis 2001, a prononcé une homélie dans l’église méthodiste de Ponte Sant’Angelo à Rome le 22 juin 2003. Il revient sur les relations contrastées de John Wesley et du catholicisme de son temps. Courts extraits de son homélie :
« John Wesley était une figure complexe, et son rapport avec l'Église catholique, ainsi que l’idée qu’il en avait, étaient tout aussi complexes. Il était prêtre de l'Église d’Angleterre, encore que certaines décisions prises à la fin de sa vie anticipaient la séparation du méthodisme d’avec l’anglicanisme. Les relations actuelles entre méthodistes et catholiques ont été influencées par l’absence d’une séparation formelle entre nous, le méthodisme étant issu de la tradition anglicane ; nous ne gardons donc pas de pénibles mémoires de séparation. Alors que John Wesley considérait l'Église catholique romaine comme faisant partie de l'Église une, sainte catholique et apostolique, et qu’il reconnaissait que les catholiques pouvaient être sauvés par la foi, ses écrits et ses sermons contiennent des références hostiles au ‘papisme’ et aux ‘erreurs de l'Église de Rome’, qu’il exprimerait sans doute différemment s’il vivait aujourd’hui.
Son commentaire de l’Apocalypse reflète une idée assez peu aimable de la papauté, au point qu’il est en quelque sorte osé de votre part de m’avoir invité ici aujourd'hui, et qu’il est peut-être tout aussi osé de ma part d’avoir accepté votre invitation ! Toutefois, la réponse catholique à Wesley et aux premiers méthodistes n’était pas meilleure et nous avons heureusement cessé de nous condamner les uns les autres.
La Lettre à un catholique romain de Wesley, écrite pendant la période des émeutes anti-méthodistes de Cork en 1749, était en quelque sorte une exception à tout cela. En effet, elle a été indiquée comme un classique œcuménique. Dans un plaidoyer pour une meilleure compréhension, Wesley expose les grandes lignes de ce qu’il considère comme étant les croyances essentielles d’un « christianisme primitif authentique », dont la plus grande partie pourrait aisément être souscrite par l'Église catholique. Il invite méthodistes et catholiques à « s’entraider en tout ce que, de commun accord, nous considérons comme conduisant au Royaume », et sa proposition est que « si nous ne pouvons pas, actuellement, penser de la même façon en toutes choses, nous pouvons au moins aimer de la même façon », et finalement, il exprime l’espoir qu’ils se rencontreront au paradis.
« Si nous ne pouvons pas, actuellement, penser de la même façon en toutes choses, nous pouvons au moins aimer de la même façon »
Une réflexion catholique sur John Wesley doit se débattre avec ses idées ambivalentes concernant l'Église catholique, mais elle ne peut se limiter à cela ; nous devons élargir notre champ de recherche, pour trouver ce qui a été le dynamisme du ministère de Wesley, la passion évangélique qui a orienté sa vie et le mouvement qu’il a créé. Nous le faisons d’ailleurs dans un nouveau contexte, avec un réexamen de la vie et du ministère de John Wesley à partir d’un point de départ très différent. À la suite de l’expérience et des rapports positifs des observateurs méthodistes au deuxième Concile du Vatican, un dialogue s’est instauré entre les Églises membres du Conseil méthodiste mondial et l'Église catholique. Nos 36 années de dialogue ont déjà porté beaucoup de fruits. Une réelle amitié est née entre nous, non seulement au niveau du dialogue officiel, mais également dans de nombreux contextes locaux où méthodistes et catholiques se considèrent comme des partenaires œcuméniques conscients de leur devoir de faire progresser leurs rapports et d’offrir un témoignage commun. L’hostilité appartient au passé et nous nous considérons désormais les uns et les autres comme frères et sœurs en Christ.
À présent, nous regardons John Wesley avec des yeux informés, tout au moins en partie, par notre dialogue et par l’expérience que nous avons du méthodisme aujourd'hui. Une étude récente sur John Wesley note qu’il a laissé une empreinte durable sur le méthodisme, plus ou moins comme Ignace de Loyola l’a laissée sur les futurs jésuites. De même, en continuant de chercher une inspiration et une orientation dans le ministère de John Wesley, nous pouvons essayer de voir et de trouver chez lui le zèle évangélique, la poursuite de la sainteté, la sollicitude envers les pauvres, les vertus et la bonté que nous avons appris à connaître et à respecter en vous. Pour toutes ces choses nous pouvons tous être profondément reconnaissants. »