Billet d’humeur
La loi de séparation entre l'Eglise et l'Etat a 100 ans !
Bernard Gisquet Pasteur
La République française fête fièrement l’anniversaire. Et les chrétiens saluent comme une conquête démocratique la loi de séparation de l'Eglise et de l'Etat qui rejoint l'intuition émiennemment évangélique : « Mon Royaume n'est pas de ce monde ». Cent ans après la promulgation de la loi de séparation, le principe reste fort heureusement de rigueur et mérite d'être porté aux nues de la République et pourtant ce n'est pas sans un certain malaise qu'on s'apprête à commémorer l'événement, peut-être bien parce qu'on est passé petit à petit de cette laïcité d'ouverture à une laïcité de combat : si la laïcité d'ouverture reconnaît droit à l'expression à toutes les composantes de la société jusque dans l'espace public, la laïcité de combat relègue à la sphère privée l'expression de la foi. Dans cette tribune libre, nous donnons la parole au pasteur Bernard Gisquet (Assemblée de Dieu, Muret) qui interpelle de manière incisive les tenants de la laïcité de combat et les invite à « jeter enfin le masque après avoir enlevé le voile ». JP Waechter
L’an de grâce 1905, la France vote la loi de séparation de l’Eglise et de l’Etat qui est surtout destinée à affaiblir la toute puissante église catholique romaine. Le Vatican refuse la loi 1905 qu’il voit comme un « short » que la République lui taille sur mesure. Après 19 ans de combats l’Etat français accepte la création des associations diocésaines, mieux adaptées au fonctionnement de l’Eglise Catholique.
Les Protestants eux, bons élèves de la République fondent des associations cultuelles et la Fédération Protestante de France. Les églises évangéliques suivent la grande sœur protestante. Tout va pour le mieux dans le meilleur des mondes.
Toujours première de la classe, dans les années quatre-vingt, la France s’attaque de pied ferme au problème des sectes. C’est la période où des islamistes font sauter des bombes dans le métro. Curieusement la docte assemblée de parlementaires et autres spécialistes va trouver des sectes partout sauf du côté de l’islam. Il faut dire que personne n’a envie de se retrouver avec une bombe devant sa porte ou sous le capot de sa voiture. Le « trouillomètre » fonctionne à fond. La fameuse liste des sectes en France oublie les fondamentalistes mais harcèle vigoureusement des groupuscules sans danger qui ont le tort de rester isolés et d’être un peu bizarres. Voici 2005, l’année bienheureuse du centenaire, et la fête continue !
La République laïque et tolérante ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Après les pseudo-sectes évangéliques listées, ce sont les curés aumôniers virés des lycées, puis les bons vacances des CAF refusés aux œuvres confessionnelles, les salles municipales difficiles à trouver pour des manifestations chrétiennes, les contrats d’assurance rompus avec certaines églises, l’agrément d’éducation populaire refusé aux associations chrétiennes, l’agrément pour recevoir les dons supprimés à une église luthérienne, et la cerise sur le gâteau nous la trouvons du côté de Montreuil.
Un beau dimanche matin, le maire apparenté communiste, débarque dans les églises évangéliques de sa commune pour vérifier si tout va bien du côté de la sécurité des locaux. C’est un vaillant le garçon, il bosse même le dimanche et en plus il lui reste la force de jouer au trublion.
Chaque fois avec le sourire on explique que non, il ne s’agit pas de tracasseries mais que tout ça, c’est normal ! Laïcité, sécurité oblige.
Eh bien non ! Dans d’autres temps et dans d’autres lieux on a qualifié ça de persécution. A force de tendre l’autre joue il vient un moment, où l’on a vraiment envie de se mettre en colère tant la mauvaise foi de certains devient évidente Heureusement quelques énervés portent plainte contre le maire hyper zélé et l’année du centenaire de la loi 1905 démarre sur les chapeaux de roues.
Mais que faut-il attendre dans notre pays pour qu’enfin quelques personnes affirment haut et fort qu’il y a des choses qui ne tournent pas rond ?
Et si tout simplement la laïcité qui se dit tolérante jetait le masque ?
Repris d’une publication d’Agapé Village (avril 2005) avec l’aimable autorisation de son auteur.