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“Marie, mère (porteuse) de Dieu ?” par le pasteur Luc Olekhnovitch

Dans cette chronique commune à quatre mensuels (Pour la vérité, Christ seul, Horizons évangéliques et ENroute), Luc Olekhnovitch, pasteur de l’Église Évangélique Libre de Meulan (Yvelines) et membre de la commission d’éthique libéro-baptiste, établit ici un rapprochement entre Mary, mère porteuse, et la vierge Marie qui a donné naissance à Jésus, soulignant au passage points en communs et différences.

De Mary et Marie

Sylvie n’a pas d’utérus, elle ne peut porter d’enfant. Alors elle a décidé avec son mari d’aller en Californie où la pratique des « mères porteuses » est légale. Elle a choisi Mary pour porter son enfant, conçu par fécondation in vitro. Mary a été défrayée à 250 dollars la semaine. Après trois tentatives (à 10 000 dollars la fécondation in vitro), Mary accouche de jumelles. De retour en France, le couple est poursuivi par la justice puisque la pratique est interdite en France, mais le juge d’instruction rend un non-lieu. Récemment, un tribunal a débouté le parquet qui voulait faire annuler l’inscription de ces enfants à l’état-civil : il a considéré avec sagesse qu’il était de l’intérêt de ces enfants d’avoir un état-civil. Mais faut -il pour autant franchir un pas supplémentaire, et, comme l’a proposé un groupe de travail du Sénat, légaliser la pratique en France ? Qu’en est-il de l’instrumentalisation de la femme qu’implique cette pratique et de l’intérêt de l’enfant ?

Dieu t’a faite mère à part entière

Marie, qu’aurais-tu pensé de tout cela ? Toi à qui Dieu a demandé de porter le Sauveur de l’humanité ? Plutôt que de « mère porteuse » on parle aujourd’hui de « gestation pour autrui » pour valoriser la générosité de l’acte. Dans le cas de Mary on aura noté que ce n’est pas une générosité gratuite. Toi Marie, tu as porté gratuitement cet enfant et il t’en a même coûté. Tu ne l’avais pas demandé, il arrivait à un mauvais moment, pourtant tu as accepté d’être enceinte pour le Dieu Tout Autre. À la demande de Dieu, tu as répondu : Je suis la servante du Seigneur, mais Dieu ne t’a pas considérée comme un simple instrument. Dieu t’a fait mère à part entière et pas simplement « porteuse ». Tu es « Marie mère de Dieu » comme disent les théologiens car tu as donné chair à Dieu le Fils. Et toi, Joseph ? Tu n’as pas apprécié cette intrusion dans le plus intime de ton couple, tu as bien failli quitter Marie. Et pourtant cet enfant de l’Autre, tu l’as adopté, élevé, lui si différent de toi, tu n’avais même pas la génétique à laquelle te raccrocher en te disant : « au moins ce sont mes gènes ! » Sais-tu, Joseph, qu’aujourd’hui en Israël on a résolu le problème de cette gêne conjugale ? Ne peut être mère porteuse qu’une femme non-mariée !

Le sort de l’enfant

Et l’enfant ? Dans la Bible, l’enfant est un don de Dieu. Dans le cas de la mère porteuse, ce n’est plus Dieu qui donne un enfant, c’est une femme. Derrière la générosité n’y a-t-il pas un sentiment de toute-puissance ? Mais c’est un don-abandon d’enfant. Un détail significatif : Mary, mère porteuse pour Sylvie, était elle-même une enfant adoptée ce qui veut dire qu’en donnant ses jumelles à Sylvie elle leur a fait vivre ce qu’elle a elle-même subi : l’abandon. J’ai observé souvent qu’un des symptômes de l’engrenage du mal, c’est la répétition. Alors qu’avec Dieu s’ouvrent des chemins neufs.

Son intérêt ultime

Et l’intérêt de l’enfant dans tout ça ? Va-t-on le faire vivre dans le secret de ses origines, lui cachant l’existence de la femme qui l’a porté ? Quand Jésus a dit à Marie : qui est ma mère ? elle savait bien qu’il n’exprimait pas de doute sur ses origines, qu’il ne niait pas être « le fruit de ses entrailles », mais qu’il affirmait son appartenance première à la communauté des croyants. Mais en sera-t-il de même de l’adolescent qui posera cette question à sa mère « intentionnelle » ?