Enseignement

Les petits selon Jésus

(Matthieu 18.1-6 + 10-14)

Ceci est le texte d'une prédication donnée par le pasteur de l'EEM de Mont-de-Marsan, René LAMEY, le 9/4/2000. Suivent les réponses données par les personnes présentes au culte ce jour-là, à diverses questions qui leur avaient été posées, sur l'accueil des "petits".

Qui est grand dans le royaume de Dieu? Qui est petit dans ce même royaume ? Qui est grand aux yeux des disciples? Qui est grand aux yeux de Jésus? Les uns et l'autre n'ont pas la même échelle de valeur, ni le même regard sur ce qui est grand ou petit.

Le plus grand dans le royaume de Dieu, c'est celui qui est petit, c'est celui qui se fait petit; le plus grand, c'est celui qui endosse l'humilité et la fragilité des petits, celui qui se met à la portée des petits. C'est là le message de Jésus, ce bouleversement, ce renversement des regards, des critères, des valeurs et des intérêts humains.

Devenir grand, c'est d'abord devenir petit; être le premier, c'est d'abord être le dernier. C'est dur à entendre, mais c'est ainsi ; ça fait mal aux oreilles des grands, mais c'est une belle musique pour les oreilles des petits.

Et Jésus a parfaitement illustré ces paroles par sa propre vie, par son propre exemple, en se mettant plus bas que ses disciples, en s'agenouillant devant ses disciples, même devant Judas et en leur lavant les pieds. Le Fils du Dieu unique et glorieux n'a pas p la couronne et le sceptre du roi, mais il a pris la bassine et le gant de toilette ; il n'a pas eu honte de se mouiller (c'est le cas de le dire !) et de prendre la place d'un esclave (dans les familles aisées, c'est l'esclave qui était chargé de laver les pieds des invités).

La vraie grandeur, c'est celle qui se met au service des "petits", c'est-à-dire non pas les enfants, comme on le pense d'ordinaire, mais ceux que la société jugeait "petits", ceux que la société méprisait à l'époque, ceux qui, comme les enfants, n'avaient pas droit à la parole, qui n'avaient droit à rien d'ailleurs, même pas au RMI, ceux qui étaient écartés de la vie sociale et religieuse.

Et là aussi, Jésus nous laisse son exemple. Durant son ministère terrestre, Jésus n'a pas cessé de redonner à tous ces petits une dignité humaine et sociale: il parle à la prostituée et lui accorde son pardon, il touche et embrasse un lépreux, il accepte à sa table des gens douteux, il ne fait pas de différence entre Juifs et païens, entre riches et pauvres, entre le pharisien zélé et le publicain ignorant, bref, par son action, ses paroles, par son attitude, Jésus est vraiment celui qui est proche des petits, il est celui qui accueille les petits.

En résumé, v 1-5: grandeur de l'humilité, grandeur du service, grandeur de l'accueil, grandeur de la simplicité, grandeur de la petitesse.

Dans la suite du texte, Jésus parle ensuite de la grandeur des petits, de la valeur qu'ont ces petits aux yeux de Dieu, et du coup, il pose aussi la question aux disciples: "Quelle grandeur ont ces petits à vos yeux?" A bien lire le texte, on se rend compte que les disciples, comme tout le monde à l'époque, et comme tout le monde aujourd'hui, n'attachaient pas de grande importance aux petits, ils ne s'en souciaient pas, ils les tenaient pour valeur négligeable, ils les méprisaient, devenant ainsi pour eux une occasion de chute et de péché. Qu'est-ce que cela signifie : devenir une occasion de chute?

Avant de répondre, j'aimerais préciser ceci: les petits, ce ne sont pas seulement les laissés pour compte de la société d'alors ou d'aujourd'hui (les vieux, les malades, les handicapés ou les marginaux de tout genre), mais les petits, ce sont aussi les petites gens, les gens simples, sans grande instruction, ceux que personne n'écoute (parce qu'ils racontent toujours les mêmes histoires), ceux que personne ne défend, ceux à qui on n'accorde pas d'attention, ceux pour qui la vie est parfois trop dure, ceux qu'on laisse sur le bord du chemin ; dans le domaine religieux, les petits, ce sont ceux qui ont une petite foi, ceux qui sont faibles dans la foi, ceux qui commencent à croire en Jésus, ceux qui ont encore une foi vacillante, pleine de doutes et de questions, ceux qui n'ont pas encore tout compris, ou qui n'arrivent pas à mettre en pratique ce qu'ils ont compris.

Eh bien, la bonne nouvelle, c'est que Jésus, lui, aime ces petits; Dieu aime ces petits, il ne veut pas qu'un seul se perde.

Jésus aime tellement ces petits qu'il va donner un sérieux avertissement à ses disciples: v 6.

Que signifie "être une occasion de chute, faire tomber dans le péché, et de quelle manière peut-on être une occasion de chute ou de péché"?

En grec, il y a ici le mot "scandaliser" qui signifie littéralement: faire tomber. Le scandale, c'est mettre un obstacle sur le chemin du promeneur pour le faire chuter, le scandale, c'est une peau de banane!

Spirituellement parlant, faire tomber quelqu'un, c'est le détourner de sa foi, c'est le faire douter de sa foi, c'est lui faire perdre la foi.

Scandaliser, être une occasion de chute, c'est l'inverse du v5, où il est question d'accueillir, et l'inverse de l'accueil, c'est le mépris, le rejet, l'exclusion du petit, du faible.

Et pour Jésus, rejeter les petits ou être un obstacle sur le chemin de leur foi, c'est quelque chose de très grave: v6b!

S'il fallait prendre cet avertissement à la lettre, je ne donnerai pas cher de notre peau, il n'y aurait pas de lac assez grand pour nous contenir tous!

Comment les disciples peuvent-ils être, comment pouvons-nous être, comment puis-je être une occasion de chute et de scandale?

Eh bien, la question des disciples et le verset 10 répondent à cette question:

- la question des disciples était : "qui est le plus grand?"; être une occasion de chute, cela signifie alors ceci : quand je crois être le plus grand, être le meilleur, le plus pur, le plus juste, celui qui sait tout, quand je me crois supérieur par ma foi, mon amour, mes connaissances, mon zèle, mon obéissance, alors je cours le risque d'avoir une corde attachée à mon cou. "Faites attention, ne méprisez pas": être un objet de scandale, c'est mépriser les petits, c'est les rabaisser, les juger ou les ignorer, c'est cette attitude hautaine et orgueilleuse que Jésus condamnera chez les pharisiens, chez ceux qui se croyaient les seuls vrais et justes croyants.

Question: que viennent faire les anges ici? Il ne faudrait pas tirer un enseignement sur les anges gardiens à partir de ces quelques mots; le contexte nous renseigne, et ce contexte, c'est le mépris: Jésus veut simplement dire ceci : quand je méprise un seul de ces petits, c'est comme si je méprisais Dieu lui-même (les anges = messagers de Dieu, qui, en son absence, le représentent); mépriser les petits, les pauvres, les faibles, c'est mépriser Dieu lui-même.

Pour Dieu, toute personne a de l'importance, tout individu a de la valeur, surtout ceux qui, à cause de notre comportement ou par nos paroles, ont chuté et se sont peut-être égarés comme cette brebis faible et petite que le berger recherche et ramène avec amour.

Dieu ne veut perdre personne, et surtout pas tous ces petits de notre société et de nos Églises. Dieu ne souhaite pas que quelqu'un soit rejeté, exclu, maudit, jugé, méprisé.

Dieu ne veut perdre aucune petite brebis, alors, n'allons surtout pas nous mettre au travers de son chemin, ne contrecarrons pas les recherches du berger, ne compliquons pas le travail du berger, ne soyons pas par nos paroles, nos attitudes, nos regards, un obstacle de plus sur la route de la découverte ou de l'affermissement de la foi de tous ces petits qui nous entourent et qui sont aimés de Dieu !

Qu'ils puissent aussi être l'objet de notre amour, que notre Église puisse être une Église qui sait accueillir avec joie et humilité les petits, que ce soit les petits en âge, ou les petits en foi, petits en connaissance, les petits de la société, les petits de l'Évangile.

Il serait vraiment dommage de retrouver notre Église au fond d'un lac.

Mais comme aucun de nous n'aimerait se retrouver dans la vase en compagnie des petits poissons, il nous faut nous poser les questions suivantes:

- comment être une Église accueillante?

- comment accueillir les "petits"?

- qui sont, autour de nous, les "petits"? Où sont-ils?

- comment les rejoindre?

- comment leur transmettre l'amour de Jésus pour eux?

Pour chercher la brebis égarée, le berger a dû sortir de la douce bergerie pour aller dans la montagne inhospitalière et dangereuse: ne faudrait-il pas que nous suivions le même exemple?

Comment faire?

Pour ne pas rester dans le vague et dans les belles paroles, je vous invite à réfléchir aux questions que je viens de poser et à écrire vos réponses sur une feuille (travail personnel ou en petits groupes, selon le choix de chacun).


Questionnaire

Réponses des personnes présentes au culte :

1. Comment être une Église accueillante?

- Être une Église accueillante, c'est aller vers les gens qui sont seuls (réponse d'un enfant) ;

- Accueillir tous ceux qui viennent, sans préjugés ni a priori, sans juger leur look, vêtements, apparence, langage, etc.;

- Avoir de l'amour pour les autres, accepter les gens tels qu'ils sont ;

- En étant nous-mêmes accueillants (hospitalité, amitié);

- En laissant la porte grande ouverte et en donnant envie d'entrer.;

- Une Église accueillante est une Église qui ouvre ses portes à tout le monde, à tous ceux qui désirent connaître Dieu, et qui écoute les besoins de ceux qui viennent et intercède pour eux;

- Être tolérant et ouvert à "l'autre";

- Ouverte à tous, simple, chaleureuse, conviviale, libre;

- C'est d'abord nous aimer ardemment les uns les autres car non seulement l'amour se dit, mais il se fait sentir en puissance ; alors nous pourrons les accueillir et ils auront envie de se réchauffer à l'amour que nous leur apporterons.

2. Comment accueillir les "petits" ?

- Avec l'Amour;

- Accueillir les petits, c'est aller vers eux et leur parler de Jésus (réponse d'un enfant);

- Avec des égards, de l'intérêt;

- Humblement, comme nous aimerions nous-mêmes être accueillis, comme Jésus nous a accueillis;

- En ne jugeant pas, en les écoutant;

- Pour accueillir les petits, il faut déjà ne pas leur montrer qu'ils sont " petits ". Il faut les mettre sur un pied d'égalité avec les grands. Les écouter, les considérer, leur donner la place qu'ils méritent, les réconforter, les consoler dans la foi du Seigneur;

- Oser les regarder. Leur adresser la parole. Aller les visiter. Les écouter dire leurs joies, leurs souffrances. Les inviter à vivre une fête toute simple;

- Avec compréhension. Les entourer. Donner du temps. S'assurer de leurs besoins (matériels et spirituels).

3. Qui sont, autour de nous, les "petits"? Où sont-ils?

- Les petits, ils sont seuls chez eux et ne viennent pas dans les Églises (réponse d'un enfant);

- Les pauvres, les sans instruction, ceux en bas de l'échelle sociale, ceux qui s'expriment mal, qui n'attirent pas la sympathie, qu'on ne remarque pas;

- Les blessés de la vie, ceux qui ne connaissent pas le Seigneur;

- Les chômeurs, les alcooliques, les malades, les personnes âgées, les illettrés, les handicapés, ceux qui ont mauvaise réputation;

- Chacun a quelque chose de petit en lui (mais on a appris à le camoufler);

- Autour de nous, les petits sont tous ceux qui sont égarés. Les petits errent, ils ne savent plus où ils sont, et qui ils sont. Ils ont besoin d'être cherchés. Les petits sont ceux qui se sentent rejetés, exclus de la société et qui ne croient plus en rien. Ils n'ont plus d'espérance;

- Notre famille. Les voisins. Le prochain.

4. Comment les rejoindre?

- Il faut chez eux et leur expliquer la vie de Jésus (réponse d'un enfant);

- En les écoutant, car personne ne les écoute (leur vie n'intéresse personne), en écoutant tous les petits détails de leur vie qu'ils ont envie de raconter, en les traitant avec égard, attention, intérêt, comme on écoute des amis: cela leur montre qu'ils ont de la valeur, de l'importance pour nous. Chaque personne humaine a de la valeur, si bas soit-elle (le balayeur en a autant que le PDG);

- En s'intéressant à eux, à leur quotidien;

- En étant attentif à cette "petitesse" et en reconnaissant la nôtre;

- Il faut aller vers eux. Et aller vers eux suppose de savoir où ils sont;

- En se mettant à leur niveau.

5. Comment leur transmettre l'amour de Jésus?

- En partageant notre amour avec eux et en leur racontant comment Dieu a fait des miracles (réponse d'un enfant);

- En témoignant en actes et en paroles et avec une attitude conforme avec la Parole;

- En leur rendant service si on en a l'occasion;

- En partageant avec eux ce que Dieu nous donne;

- En les aimant parce qu'ils sont enfants de Dieu et non parce qu'ils sont "petits";

- Pour leur transmettre l'amour de Jésus, il faut d'abord leur faire comprendre ce que c'est que cet amour car le plus souvent, les petits sont ceux qui ne s'aiment plus eux-mêmes; ils ont de la haine, de la souffrance intérieure;

- Oser dire notre pauvreté, notre "richesse", en particulier ce que l'amour reçu du Seigneur a fait en nous;

- En faisant référence au Christ par la mise en pratique dans notre vie;

- En mettant en pratique les quatre premières questions et y joignant la prière.

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A vous maintenant d'ajouter vos propres réponses et réflexions en espérant qu'elles conduisent à des actions concrètes envers les "petits", quels qu'ils soient.

René LAMEY