En route à deux

Les trois vertus cardinales du couple ou comment tenir dans la durée par René Lamey

Connaissez-vous ce qu’on appelle les « trois vertus cardinales de la foi » ? L’apôtre Paul les mentionne à la fin de son fameux hymne à l’amour : En somme, trois choses demeurent : la foi, l’espérance et l’amour (1Co 13.13). Le chrétien a besoin de ces trois éléments pour « tenir la route », pour marcher avec le Seigneur d’une manière digne. Il en sera de même pour le couple, comme nous l’explique maintenant René Lamey.

Les trois vertus portent d’autres noms (sauf un). Former un couple, c’est à la portée de tout le monde (du moins, théoriquement). Se mettre en couple prend de moins en moins de temps ; il suffit parfois d’une seule rencontre et très vite, on décide d’habiter sous le même toit. On ne réfléchit pas longtemps et on espère que ça marchera, on espère tenir le coup : amour ne rime-t-il pas avec toujours ? C’est un peu comme une voiture : il est facile et rapide de tourner la clé et de lancer le moteur : mais celui-ci tiendra-t-il longtemps ?Comment faire durer le couple, comment prolonger l’amour ? Permettez-moi de vous décrire courtement trois éléments, trois principes de base qui permettent aux couples de durer : ce sont les trois vertus cardinales du couple : l’amour, l’estime, la complicité.


1. L’amour
Sans amour, je ne suis rien, dit Paul dans son hymne. Sans amour, le couple n’est rien ; sans amour, le couple n’existe pas ou n’existe plus : il y a juste deux « étrangers » qui cohabitent plus ou moins bien ensemble ; sans amour, pas d’avenir pour le couple. L’amour est le ciment du couple. Aimer l’autre, c’est aimer ce qu’il/elle est fondamentalement, en tant que personne à part entière. Cela ne signifie pas que j'aime tout en elle, sans faire de nuances. Elle a certainement des défauts qui me déplaisent, des habitudes qui ne me conviennent pas, des comportements qui me dérangent. Mais il est important que ces aspects agaçants demeurent à mes yeux des composantes accessoires de sa personne, des caractéristiques secondaires qui ne font pas directement partie de celles qui la définissent essentiellement ; l’image suivante n’est certes pas parfaite, mais elle peut nous aider : je peux « flasher » pour un artiste et pourtant ne pas apprécier toutes ses œuvres, ou être « fan » d’un groupe sans pour autant aimer toutes les chansons de son CD.Aimer, c’est éprouver des sentiments, avoir le cœur gonflé de désir : pas seulement de désir physique (même s’il est important et nécessaire), mais aussi désir d’aimer, désir de continuer la route avec lui/elle.Aimer, c’est continuer à admirer l’autre pour ce qu’il/elle est. Cet amour n’est pas seulement romantique et sentimental : il faut de la volonté pour aimer jour après jour, année après année.
2. L’estime
Chez l’adulte, l’amour réel implique toujours une part d’estime. L’estime réciproque est une des pierres angulaires de la solidité d’un couple. Quand j’estime mon conjoint, je le lui dis, et en le lui signifiant, je le valorise, je le complimente, je l’encourage, je lui montre qu’il a de la valeur à mes yeux, qu’il compte pour moi, que j’apprécie sa personne et ses qualités. Pour autant, l’estime n’est pas aveugle : il y a des choses en lui que je n’apprécie pas mais qu’importe, une bonne estime de l’autre saura passer par-dessus ces petits (ou grands) défauts. Un couple se dessèche quand il n’y a pas plus d’estime : la relation devient triste et terne. L’estime constitue également un pilier essentiel de la complicité.
3. La complicité
La vie en couple nous amène à partager un grand nombre de choses : lieux où nous vivons, revenus et dépenses générales, tâches domestiques, éducation des enfants, projets en tous genres… Lorsque l’entente entre les conjoints n’est pas parfaite, des conflits surgissent rapidement car les occasions sont innombrables. Sans une solide complicité, ces conflits peuvent facilement devenir insolubles. Par « entente parfaite », j’entends le partage d’une même vision sur l’ensemble des questions essentielles pour chacun. Cela ne signifie pas qu’il n’y ait jamais de discussion ou de mésentente, bien au contraire. Mais cette vision commune est nécessaire pour qu’il soit possible de réussir à s’entendre en s’assurant que les deux partenaires sont satisfaits.

La complicité ne se commande pas et on ne peut la forcer ; elle existe ou n’existe pas. Il s’agit , d’une entente profonde basée sur le partage de valeurs, de vision de la vie et de bon nombre de besoins communs. Elle prend la forme d’une connivence qui pousse chacun à s’associer facilement à l’autre et à lui apporter spontanément son support dans la recherche de satisfaction et la poursuite de ses objectifs principaux. Sans complicité, plus de regards brillants, plus de lumière dans les yeux, plus de sel dans la relation…

Affaire d’équilibre
L’amour, l’estime, la complicité sont les ingrédients qui permettent à la relation conjugale de durer dans le temps : quand l’un vient à manquer, le couple est déséquilibré. C’est comme un trépied : enlevez un pied et vous vous retrouvez par terre. Ces trois vertus cardinales du couple s’érodent avec le temps (quand on n’y prend pas garde) et se fragilisent avec les tensions inhérentes au couple. Pour durer, elles ont besoin de soutien mutuel, de nourriture affective et spirituelle ; il faut les « bichonner », en prendre soin jour après jour. C’est de cette façon-là qu’on peut faire rimer « amour » avec « toujours ».

René Lamey, pasteur et thérapeute conjugal