La billet de l'évêque

Peur »

Évêque Patrick Streiff

Je viens de rentrer des USA. La peur y est toujours présente et avec elle, des représentations précises quant à l’ennemi. On y entend l’appel à encore plus de sécurité contre les attentats terroristes ; à des compétences encore plus étendues allant jusqu’à des mesures coercitives afin d’extorquer des aveux aux prisonniers ; au renforcement des mesures d’endiguement de l’immigration illégale à travers la frontière verte avec le Mexique ; à l’application de la force militaire à l’encontre l’Iran, etc. En Suisse aussi, c’est la peur des abus dans le domaine de l’asile et non le souvenir de la grande tradition humanitaire de la Suisse qui a dominé la récente votation populaire. La peur mène à un besoin accru de protection.

Il rend justice à l'orphelin et à la veuve et témoigne son amour à l'étranger en lui assurant le pain et le vêtement. Vous aussi, vous aimerez l'étranger parmi vous, car vous avez été étrangers en Egypte. (Dt 18.10-11)

Mais n’est-ce pas plutôt la crainte de l’Éternel, qui est le commencement de la sagesse qui nous manque ? Non pas dans le sens d’une peur menaçante, intimidante, mais dans le sens biblique originel du respect envers Dieu ? Un respect qui donne la première priorité à Dieu et à son exigence par rapport à notre vie ? Le respect envers Dieu est le commencement de la sagesse. Il libère des réactions de peur et rend capable d’actions porteuses d’espérance. Il permet à la vie de se fonder sur la confiance en Dieu plutôt que sur la peur constante devant les menaces.
Le respect envers Dieu conduit aussi au respect de la vie, parce que Dieu est le créateur de tout ce qui est vivant. Le respect de la vie pose des limites à l’exercice du pouvoir et réduit les représentations hostiles. Si un tel respect envers Dieu était le fondement de la vie, il y aurait plus que seulement 5 % de la population des USA pour approuver l’application des Conventions de Genève aux prisonniers de guerre. Et on accorderait plus d’attention, en Suisse (ndlr et en France), au fait que Dieu est un protecteur des faibles et des défavorisés (voir Dt 10.18 et suivants). Pour ma part, je souhaiterais moins de peur et plus de respect envers Dieu.

Traduction Frédy Schmid