CPDH

2e Congrès protestant évangélique européen d’éthique du 23 au 25 mai 2008 à Strasbourg

« Chrétien et citoyen — espérance et responsabilité »

Notes recueillies par Daniel Husser, vice-président du CPDH

Un simple clic pour accéder au clip

A l’heure où l’articulation du religieux avec les affaires de l’Etat fait débat, les évangéliques réunis en congrès à Strasbourg à l'initiative du CPDH ont rappelé leur attachement à la laïcité comme à la séparation de l’Eglise et de l’Etat. Ils ont également évoqué les formes et les limites de leur engagement chrétien dans la sphère publique. Retour sur l'événement avec Daniel Husser et la Déclaration finale, excellente synthèse des débats.


Daniel Husser se limite ici au partage de quelques paroles fortes extraites de ses notes.

Ils ont dit :

Claude Baty, président de la Fédération Protestante de France (FPF)

Il est important de repenser les rapports religion-politique-société et de ne pas se laisser aller à des attitudes telles que : « les politiciens, tous pourris… » ou « rendons à César ce qui est à César, c’est-à-dire la politique, et donc ne nous en occupons pas… ».… Il faut par ailleurs s’élever contre une notion de la laïcité qui voudrait cantonner les chrétiens dans leur royaume céleste !… Le rôle des chrétiens dans la société consiste à dénoncer les idoles, la démagogie et l’égoïsme individuel, national et multinational et de s’engager humblement pour le bien commun.


Gordon Showell-Rogers, secrétaire général de l’Alliance évangélique européenne (GB)

En France, les protestants évangéliques sont perçus comme des minoritaires. Cela leur donne la chance d’être mieux écoutés que dans les pays où, vu leur nombre important, ils sont perçus comme « les seigneurs de la terre ».


Henri Blocher, doyen honoraire de la FLTE de Vaux sur Seine

Les protestants évangéliques devraient éviter de vouloir paraître plus spirituels en se montrant plus pessimistes…, pessimisme qui tombe parfois sur l’institution ecclésiale elle-même.… Notre mission est, avant tout, d’être actifs, au service de l’espérance.



Anna Zaborska, député européen de la Rép. de Slovaquie

Les lois relatives à la bioéthique évoluent de plus en plus rapidement. Ainsi, le Parlement anglais vient de légitimer des recherches concernant les « bébés médicaments » et les croisements génétiques humains-animaux… ; c’est ce que Daniel appelle « l’abomination de la désolation ». Paul, lui, nous appelle à « glorifier Dieu dans nos corps ».… Dans un proche passé, le droit exclusif de guidance a été usurpé par des régimes totalitaires, tels que le communisme. Des chrétiens de mon pays ont résisté au prix de leur liberté et de leur vie.… Aujourd’hui, il s’agit de lutter contre la séduction de la science qui veut s’arroger ce même droit. Les chrétiens sont appelés à aider leurs concitoyens à découvrir Celui qui est, pour tous, « le chemin, la vérité et la vie ».


Malcolm Harbour, député européen (GB), qui organise tous les mercredis, pendant les sessions du Parlement européen, des « petits-déjeuners de prière ».

Contactez et encouragez vos parlementaires et politiciens, notamment ceux qui sont chrétiens, pour qu’ils travaillent à un meilleur futur. Priez pour nous et aidez–nous à tenir notre rôle !


Général Philippe Morillon, député européen, ancien commandant des Casques bleus en Bosnie

Ma plus belle récompense, c’est ce qu’on m’a dit à mon départ de l’armée, pour la retraite : « Quand vous étiez en Bosnie, nous ne savions pas que vous étiez chrétien, mais nous nous en sommes doutés ».… Certes, ce n’est pas parce que nous sommes chrétiens que nous sommes les meilleurs, mais si nous, nous n'étions pas chrétiens, nous serions encore plus mauvais ! En voyant, en Bosnie, combien des orthodoxes, catholiques et musulmans qui précédemment vivaient ensemble en bons voisins, pouvaient, en quelques jours, devenir remplis de haine et assoiffés de vengeance et de sang, j’ai compris ce qu’était le péché originel.… Pour moi, la reconnaissance de l’indépendance du Kosovo par l’Europe, fut une erreur. J’ai toujours été impressionné par la pensée du père de l’Europe, Robert Schuman, qui exhortait les anciens belligérants (France, Allemagne) à s’accepter dépendants, pour lutter ensemble contre la peur de l’autre. Aimer, c’est s’accepter différents et dépendants.… En tant que chrétiens, nous avons la mission d’être « artisans de paix », car Jésus nous dit : Heureux ceux qui procurent la paix… et Tu aimeras ton prochain comme toi-même.. Cela n’est pas facile, car le prochain, c’est celui qui est tout près de vous et qui, souvent, vous dérange… Il est plus facile d’aimer les phoques, car ils ne viendront pas vous embêter dans votre baignoire !


Sébastien Fath, sociologue, chercheur au CNRS

Une approche prospective pour aujourd’hui et demain, par les chrétiens évangéliques, doit tenir compte des données suivantes :

- La crise de l’État-providence. Les églises évangéliques, pour la plupart de forme congrégationaliste et autogestionnaire sont bien adaptées à faire face à cette situation.

- Une société pluraliste, de plus en plus sécularisée, en France et en Europe. Les situations minoritaires étant de plus en plus banalisées, les protestants évangéliques souffrent moins de cette évolution ; mais la question se pose : comment se faire entendre ?

- Une intégration et unification européenne en progression. Cette évolution est plutôt favorable aux églises évangéliques qui ne cherchent pas à s’affirmer comme des églises nationales indépendantes, mais qui, au contraire, sont ouvertes aux alliances et réseaux internationaux.

Un conseil : les protestants évangéliques ne devraient pas trop se lamenter au sujet d’un manque de soutien financier et de tutelle de la part de l’État. Une tutelle croissante entraîne une laïcisation et une perte d’identité croissantes. Cela est surtout vrai pour les œuvres issues des églises.


Frédéric Rognon, Professeur à la Faculté de Théologie protestante de Strasbourg, spécialiste de l’oeuvre de Jacques Ellul, a mis en relief les pensées suivantes :

La seule véritable révolution, c’est la révolution du style de vie des chrétiens. Le message du Christ est un message subversif.… Il n’y a pas de morale chrétienne. L’essentiel, c’est la foi en Jésus Christ. Cette foi bouleverse la vie des chrétiens et les rend différents.… La société actuelle se réfère essentiellement à la norme de l’efficacité, avec des propos tels que : « tout ce que nous sommes capables de faire, il faut le faire » ou (comme l’a exprimé une autre personne) « ça marche, donc c’est bien ».… Rechercher l’efficacité à tout prix, c’est chercher à se passer de Dieu. De tels principes doivent être mis en question par les chrétiens, selon l’exhortation de Ro 12.2 : Ne vous conformez pas au siècle présent, mais soyez transformés par le renouvellement de votre intelligence, pour discerner quelle est la volonté de Dieu : ce qui est bien, ce qui lui est agréable, ce qui est parfait.Qu’est-ce qui « est bien » ? Le bien, c’est le fait de discerner, par l’Esprit Saint, la volonté de Dieu, dans chaque situation. Le contraire du conformisme, ce n’est pas l’anticonformisme, mais c’est le discernement. Le discernement, c’est entrer dans la liberté du Christ qui est une libération de soi-même. Être libre de soi-même, c’est pouvoir s’engager dans le monde après en avoir été dégagé.


Franck Meyer, maire, porte-parole du Collectif des maires pour l’enfance

Recherchez le bien de la ville où je vous ai déportés, et priez l’Éternel en sa faveur…

(Jr 29.7) Cette invitation ne s’adresse pas à des gens qui vivent dans leur ville natale, parmi parents et amis, mais dans une ville qui vit selon d’autres lois, où ils sont perçus comme étrangers, en situation de minorité mal considérée. Et néanmoins, Dieu les invite à agir et à prier pour le bien de leurs concitoyens actuels. C’est en obéissance à cette parole que je n’ai pu rester inactif lorsque j’ai appris que le maire de la commune de Bègles allait marier ostensiblement deux hommes, contrairement aux lois de la République. J’ai écrit alors aux 36 000 maires des communes de France, pour leur poser simplement deux questions :

- Pensez-vous qu’un mariage concerne un homme et une femme ?

- Pensez-vous qu’un enfant a besoin d’une mère et d’un père ?

Contrairement à tous les pronostics pessimistes, j’ai reçu 11 000 réponses positives et seulement 5 négatives. Ce fut un encouragement à ne pas se résigner devant la dictature du fait accompli. Il est important de donner notre avis… lorsqu’on ne nous le demande pas !


Jean-Paul Zurcher, secrétaire général du Réseau évangélique suisse

Jusqu’où, nous, protestants évangéliques, acceptons-nous la liberté d’expression ? Nous avons été confrontés à cette question à l’occasion d’un article blasphématoire paru dans un journal suisse, ainsi que d’une affiche scandaleuse relative à la lutte contre le Sida. Nous pensons qu’il faut réagir, mais dans la dignité. Nous l’avons fait en recherchant le dialogue avec les auteurs de l’article et de l’affiche et cela a eu de meilleurs résultats que ne l’aurait eu l’envoi de lettres et 

d'articles incendiaires. Bref, il importe de ne pas être uniquement réactifs, mais d’être proactifs.


Jean-Marc Potenti, président de l’Institut de Développement, de Recherche et de Réconciliation

Notre action est trop souvent imprégnée d’une attitude défensive ; nous devrions nous efforcer de devenir de plus en plus une force de proposition. Avons-nous vraiment fait le deuil de l’utopie d’une théocratie ? Savons-nous vivre en témoins dans une société pluraliste ? Il est important de distinguer deux niveaux d’engagement :

- Le niveau spirituel et théologique : à ce niveau, il s’agit d’être ferme et de mener le bon combat de la foi

- Le niveau politique et sociétal : il nous appartient de considérer que la liberté est une et indivisible et qu’elle ne peut être refusée à aucune croyance ou philosophie.

Selon ce principe, on ne peut pas non plus accepter que la foi chrétienne puisse être confinée dans la sphère privée, car elle peut apporter des orientations favorables à une vie sociale harmonieuse et concerne de ce fait aussi le domaine politique et social.


Georgina Dufoix, ancien ministre d’État et ancienne présidente de la Croix-Rouge française

Alors que tout m’avait réussi, dans ma vie familiale comme dans ma carrière politique, j’ai dû faire face pendant 7 années (1992-1999), à des attaques et accusations terribles (affaire du sang contaminé, suspicion de malhonnêteté et de sectarisme). Si je n’avais pas vécu une réelle conversion avant ce temps d’épreuves, j’aurais craqué et mis fin à ma vie. À partir du moment où, dans la prière, j’ai pu offrir mon orgueil au Seigneur, j’ai trouvé la capacité d’aimer l’une de mes pires adversaires, une journaliste, qui s’acharnait contre moi et j’ai retrouvé la paix.… Aujourd’hui on essaie d’écarter la dimension spirituelle des problèmes de société. Nous avons à faire face à un combat spirituel, c’est-à-dire à la lutte contre la séduction, présentée de façon de plus en plus séduisante, qui affirme que nos corps et nos vies nous appartiennent à nous seuls, alors que la Parole de Dieu nous dit (1Co 6.19) : Ne savez-vous pas que votre corps est le temple du Saint Esprit… et que vous ne vous appartenez pas à vous-mêmes ? Car vous avez été rachetés à un grand prix. Glorifiez donc Dieu dans votre corps et dans votre esprit qui appartiennent à Dieu.

Pour en savoir plus, allez sur le site du cpdh