Enseignement

DE LA FÊTE DE RECONNAISSANCE

Introduction
La fête de reconnaissance, appelée par certains fête des moissons, qui a lieu au temps des vendanges, c'est-à-dire en octobre, n'est pas une idée des seules Églises protestantes ou évangéliques. Certes, cette fête occupe une place importante dans la vie des Églises Évangéliques Méthodistes. Le culte trouve une forme liturgique solennelle. Les chants de louange sont adressés au Dieu créateur qui dans sa bienveillance donne la vie et de ce fait le « pain quotidien ». Ce dernier, pour nous citoyens d'aujourd'hui, consiste dans le salaire de notre travail, dans les pensions qui sont versées aux retraités et dans les aides sociales. C'est aussi une bonne santé et des conditions de vie convenables. Luther a écrit que pour lui toutes choses de la vie, y compris les bons voisins font partie du pain de chaque jour. Dans nos Églises, la libéralité pratiquée lors de la célébration de la fête de reconnaissance est une précieuse aide financière pour la gestion de la vie matérielle de la communauté locale.

L'Ancien Testament
Notre reconnaissance s'adresse à Dieu
Lorsque nous prenons la concordance biblique en main et recherchons les versets qui contiennent les termes de récolte, moisson, vendange, reconnaissance, nous nous rendons compte qu'ils se trouvent surtout dans l'Ancien Testament. Ils font partie de la vie du peuple d'Israël. C'est le Dieu souverain qui les établit. Il demande aux Israélites de le louer, de lui adresser leur reconnaissance car il est le donateur de toute chose. C'est lui qui donne la vie aux humains. C'est lui qui rend fertile la terre. C'est lui qui manifeste sa bienveillance de génération en génération envers les hommes et les femmes. Pour les auteurs des livres bibliques chaque enfant est un don de Dieu. Au Psaume 127.3 nous lisons: «Voici que les enfants sont un héritage de l'Éternel. Le fruit des entrailles est une récompense.»
De ce fait le peuple élu adresse quotidiennement, par les prières à table, sa reconnaissance au Créateur et Père. Il célèbre son nom, conformément aux ordonnances communiquées au temps de la Loi.
Depuis le mont Sinaï
Dès la conclusion de l'Alliance dans la plaine du Sinaï, Israël est appelé à célébrer la fête des moissons et la fête de reconnaissance. La première de ces fêtes se situe au commencement des récoltes, la deuxième au temps où tout est engrangé, les réserves étant constituées pour l'hiver. Ceci nous dit que les prescriptions données dans le cadre de la législation du Sinaï ne sont pas applicables avant la prise de possession de la terre promise. Lors de la traversée du désert, il n'y avait ni semailles, ni moissons. Le pain quotidien était la manne et les cailles. Les habits ne s'usaient pas nous dit l'Écriture.
Jusqu'en Canaan
Étant devenus sédentaires après la conquête de la terre promise, les Israélites sont chargés de cultiver la terre. Les promesses du Dieu souverain deviennent concrètes pour Israël ainsi que les réalités de la création puisque «L'Éternel Dieu prit l'homme et le plaça dans le jardin d'Eden pour le cultiver et pour le garder." Après le déluge, il affirmera à Noé et sa famille: «Tant que la terre subsistera, les semailles et la moisson, le froid et la chaleur, l'été et l'hiver, le jour et la nuit ne cesseront pas.» (Genèse 8.22)
C'est au peuple élu séjournant à proximité du mont Sinaï que l'Éternel dit : «Observe la fête de la moisson, des prémices de ton travail, de ce que tu auras semé dans les champs ; ainsi que la fête de la récolte, à la fin de l'année, quand tu recueilleras des champs le fruit de ton travail» (Exode 23.16).Notons en passant que les historiens nous relatent que les Cananéens, habitant alors la Palestine avant la venue des Israélites, célébraient eux aussi des fêtes de la récolte en l'honneur des divinités de la fertilité. Le Dieu de la révélation ne supprime pas une saine tradition, il la modifie, il la sanctifie et la place dans la cadre de son alliance avec le peuple élu.
Dieu prend soin de sa création
Par les fêtes de la moisson et des récoltes, le Dieu d'Abraham, d'Isaac et de Jacob atteste donc à son peuple qu'il prend soin de la création et reste fidèle à sa promesse. Il permet de semer, de récolter. Il demande à ceux qui cultivent la terre ainsi qu'à ceux qui gardent les troupeaux ou exercent un métier de le remercier par des cultes particuliers. Le croyant de tous les temps dit au Créateur sa reconnaissance pour les biens de la vie et confesse sa dépendance à l'égard du Dieu invisible et souverain.
Les fêtes de la moisson et des récoltes qui affirment la reconnaissance se célèbrent à des dates différentes du temps des royaumes séparés. En Juda (le royaume du Sud) elles ont lieu le septième mois de l'année. En Israël (le royaume du Nord) elles ont lieu le huitième mois. D'après certains commentateurs, cette différence serait due au climat.
La fête des moissons
La fête des moissons eut lieu au début des récoltes des céréales, cinquante jours (pentakosta) après la Pâque juive (Lévitique 23.15 et suivants). La première gerbe de blé moissonnée est offerte à Dieu ; elle est portée au sacrificateur. Elle précède donc toutes les récoltes qui suivront. Nous pouvons dire qu'elle sanctifie la totalité des biens (fruits) engrangés. Il me semble qu'elle rappelle la prière avant le repas.A la fin des récoltes, le peuple d'Israël célèbre la grande fête de reconnaissance. Les cultivateurs de la terre promise qui ont eu l'heur de récolter le blé, froment et autres céréales se souviennent des directives fixées dans Lévitique 19.9-10 qui stipulent : « Quand vous ferez la moisson dans votre pays, tu laisseras un coin de ton champ sans le moissonner et tu ne ramasseras pas ce qui reste à glaner. Tu ne cueilleras pas non plus les grappes restées dans ta vigne et tu ne ramasseras pas les grains qui en seront tombés. Tu abandonneras cela au malheureux et à l'immigrant. Je suis l'Éternel, votre Dieu ». Les vendanges sont donc terminées, le vin se trouve dans les outres. Les olives sont cueillies, la moisson dans son ensemble est passée, l'été est terminé. Les provisions pour l'hiver ne manquent pas. Dans sa bonté, Dieu a pourvu au pain de chaque jour. Le peuple doit entonner les chants de louange dans une profonde reconnaissance, car les paroles du Psaume 145.15-16 se sont réalisées: «Tous, avec espoir, tournent les yeux vers toi, c'est toi qui leur donnes leur nourriture en son temps. Tu ouvres ta main et tu rassasies à souhait tout ce qui a vie.»Il est spécifié dans Lévitique 23.17 que l'Israélite lors de la fête des moissons apportera deux pains pour les dédier à Dieu ainsi que deux agneaux.
La fête des récoltes
Quant à la fête des récoltes, Lévitique 23 nous informe à partir du v. 39 que «c'est la grande fête qui durera 7 jours : le premier jour sera un jour férié et le huitième sera un jour férié». Il est précisé que c'est une double fête - celle des huttes en souvenir de la sortie d'Égypte et en même temps la fête des récoltes. Le peuple de Dieu est invité à se réjouir devant l'Éternel, son Dieu, pendant sept jours.Notons qu'en année de jubilé (tous les 50 ans) Israël n'a ni à semer, ni à moissonner, ni à vendanger (Lév 25.11-12). «Vous la regarderez comme saint. Vous mangerez le produit des champs. »Esaïe 9.2 parle de la joie des récoltes : «On se réjouit comme on se réjouit à la moisson». Au Psaume 126.5 nous apprenons qu'«ils moissonnent avec des cris d'allégresse ».
Le Nouveau Testament
Le N.T. ne cite explicitement ni la fête de la moisson, ni celle des récoltes, ni les vendanges. Les Juifs et les Galiléens du temps de Jésus pratiquaient la tradition des pères, ainsi faisaient donc les apôtres se trouvant à Jérusalem. Il n'est rien dit des chrétiens d'origine païenne, ni dans le livre des Actes, ni dans les lettres de Paul, dans lesquelles nous trouvons des exhortations à la reconnaissance envers le Dieu de Jésus-Christ.
Cependant, nous retenons ceci des Évangiles et des Épîtres : dans Jean 4.36-37, Jésus parle du moissonneur et dit que l'un sème et que l'autre moissonne. Matthieu 9.37-38 nous rappelle que Jésus affirme aux disciples que la moisson est grande, mais qu'il y a peu d'ouvriers. Il nous faut donc prier le Seigneur de la moisson d'envoyer des ouvriers dans la moisson.Paul, quant à lui, exhorte les chrétiens de Corinthe en leur écrivant que « celui qui sème peu moissonnera peu ». (2 Cor 9.6). Aux Galates (6.2), il dit que « ce qu'un homme sème, il le moissonnera ».
Conclusion
En conclusion, nous retenons que la fête de reconnaissance a un fondement biblique. Après les récoltes des blés, les vendanges et la cueillette des olives, nous chrétiens avons le privilège de célébrer Dieu, lors d'un culte spécial marquant notre reconnaissance. Nous citadins, qui sommes sans champs à labourer, exerçant toutefois notre profession et nous impliquant dans la vie active (ou étant retraités), sommes conscients que notre être et nos agissements découlent de la grâce de Dieu. Nous lui adressons lors d'un culte solennel notre reconnaissance profonde en Jésus Christ. Nous n'omettons pas de lui adresser notre merci lorsque nous nous mettons à table. Nous n'oublions pas l'apôtre qui nous dit : «Soyez reconnaissants, rendez grâces » (1 Thess 5.18).
Samuel LAUBER