Persécution dans le monde

Index mondial de persécution 2014


Chaque année depuis 1997, Portes Ouvertes publie l’Index Mondial de Persécution, un classement des 50 pays où les chrétiens sont le plus persécutés en raison de leur foi. 2014 ne faillit pas à la règle. Portes Ouvertes communique à la presse le 7 janvier à Paris les résultats de l’enquête qu’elle a menée sur le terrain dans plus de 60 pays.

Portes Ouvertes / eemni


Pour le dire simplement, la situation ne s’arrange pas pour les chrétiens à travers le monde. La persécution s’intensifie même sous l’effet de divers conflits, note Portes Ouvertes. L’ONG chrétienne lance l’alarme tout en multipliant ses efforts pour venir en aide aux victimes de l’oppression.

Portes Ouvertes assimile à de la persécution tout acte porté contre un chrétien parce qu’il est chrétien. La persécution ne vient pas toujours de l’État, mais l’État y est souvent impliqué. En la matière, l’État n’est jamais neutre.

La persécution peut prendre diverses formes et constituer des atteintes à la vie privée. La restriction de la liberté de pensée et d’expression peut être couplée à la discrimination à l’embauche.

Grandes tendances

L’index 2014 fait ressortir quatre tendances principales de la persécution contre les chrétiens :

Une augmentation générale de la persécution des chrétiens : avec une hausse des points de persécution attribués à chaque pays. En 2013 on totalisait 2 683 points pour les 50 pays de l’index. Cette année, on en totalise 3 019.

Une Afrique subsaharienne qui devient un champ de bataille pour l’Église : avec 18 pays africains présents dans l’index 2014, certains très hauts placés, comme la Somalie (2), le Soudan (11), l’Érithrée (12), la Libye (13), le Nigeria (14)… On note également l’arrivée spectaculaire de la Centrafrique dans le classement, en 16e position. De plus, les pays africains comptent parmi ceux qui connaissent le plus grand nombre de martyrs chrétiens.

Un « hiver chrétien » qui devient glacial dans certains des pays musulmans ayant connu le printemps arabe : en Syrie et en Égypte, les chrétiens ont continué à subir de graves violences en 2013. L’Égypte est le pays où les chrétiens ont subi le plus de violence : au moins 167 actes violents de persécution avérés et plus de 492 tentatives de fermetures d’églises ou bâtiments annexes en Égypte. La Syrie détient le triste record du nombre de chrétiens assassinés avec 1 213 assassinats avérés de chrétiens en Syrie, dépassant ainsi le Nigeria (chiffres recoupés dans la presse).

Une nette augmentation de la persécution dans les États dits « défaillants » : Parmi les dix pays classés en haut du classement de l’index 2014, on trouve six États dits défaillants : la Somalie (2), la Syrie (3), l’Irak (4), l’Afghanistan (5), le Pakistan (8) et le Yémen (10).

Analyse

Corée du Nord — Pour la douzième année consécutive, la Corée du Nord reste le pays où, pour les chrétiens, l’existence est la plus dangereuse et la plus précaire. Des dizaines de milliers de croyants croupissent dans les camps. On estime à quelque 150 000 le nombre de croyants qui persistent dans la foi.

Islamisme : Dans 36 des 50 pays recensés dans l’index, l’islamisme est largement responsable de la persécution endurée par les chrétiens. Les régions les plus violemment touchées par ce phénomène sont aujourd’hui les pays de la ceinture sahélienne, où un cinquième des chrétiens du monde côtoient un septième des musulmans du monde dans une proximité dangereuse.

Violences : En 2013, les pays dans lesquels les chrétiens ont subi le plus de violence étaient dans l’ordre : la Centrafrique, la Syrie, le Pakistan, l’Égypte, l’Irak, le Myanmar, le Nigeria, la Colombie, l’Érithrée et le Soudan.

Pressions : La persécution se caractérise aussi par une pression quotidienne morale et sociale. Les pays qui ont imposé la plus lourde pression sur les activités chrétiennes en 2013 sont : la Corée du Nord, l’Afghanistan, les Maldives, la Somalie, l’Arabie Saoudite, le Yémen, l’Iran, la Libye, l’Ouzbékistan et le Qatar.

Joseph Fadelle

Auteur du livre : « Le prix à payer »

Joseph (anciennement Mohamed) est un Irakien qui s’est converti au christianisme pendant son service militaire. Sa lecture du Coran le convainc de la non-pertinence de l’islam et sa lecture de l’Évangile lui permet de rencontrer le Christ et d’entamer sa vie chrétienne : « j’ai la foi en Lui, je deviens chrétien ».

Quand sa famille apprend sa conversion, elle met tout en œuvre pour le faire revenir sur sa décision. Après les intimidations et les coups, viennent la prison et la torture. Joseph vit un long calvaire mais ne cède pas. Une fatwa est prononcée contre lui. « Je vais subir une fatwa, la prison, la torture, je m’échappe et me réfugie en Jordanie, retrouve ses frères et des parents qui lui tirent dessus en pleine rue. « J’échappe à un attentat. Je reçois le baptême en Jordanie après 13 ans d’attente, de souffrances ». C’est là qu’il prendra le prénom de Joseph.

Pour sauver sa vie, Joseph Fadelle est obligé de fuir son pays avec sa femme et ses enfants.

Il vit aujourd’hui en France. Dans le livre « le prix à payer » (publié aux Éditions l’Œuvre, 2012), il raconte son histoire.

Les chrétiens d’origine musulmane subissent une terrible persécution, la plupart du temps elle reste silencieuse. Joseph Fadelle a décidé de témoigner pour la mettre en lumière.


États défaillants : L’index 2014 fait ressortir une nette augmentation de la persécution pour les communautés chrétiennes dans les pays où l’État est défaillant et n’est plus en capacité d’assumer pleinement son rôle. Parmi les dix pays classés en haut du classement de l’index 2014, on trouve six États dits défaillants : la Somalie (2), la Syrie (3), l’Irak (4), l’Afghanistan (5), le Pakistan (8) et le Yémen (10). Un autre État en spectaculaire déliquescence a fait son apparition cette année : la Centrafrique, qui vient prendre la 16e place. La Libye (13) et le Nigeria (14), quant à eux, restent assez haut placés dans l’Index.

Somalie — Atteinte à la liberté la plus intime, le droit de pensée : Pour la première fois dans l’histoire de l’Index Mondial de persécution, un pays d’Afrique sub-saharienne occupe la seconde place du classement ; l’année dernière, la Somalie occupait la 13e place. Les chrétiens subissent une forte pression qui va jusqu’à porter atteinte à leur liberté de pensée la plus intime. Le pays se rapproche de la Corée du Nord dans ce domaine. Les églises doivent opérer dans le plus grand secret. La Somalie est dirigée principalement par des tribus et des clans musulmans, qui n’acceptent pas de chrétiens parmi eux, et qui mettent à mort quasiment tous les chrétiens qu’ils rencontrent. De grandes portions du pays restent ingouvernables et les rebelles Shebab, en replis, se vengent en imposant une interprétation de la charia (loi islamique) extrêmement sévère. Même si Mogadiscio, la capitale, est sous l’emprise de musulmans plus modérés, ils opèrent tout de même une étroite surveillance afin d’éradiquer tous ceux qui auraient quitté l’islam.

Syrie — le visage de la persécution a changé : Alors que dans la Syrie d’avant-guerre, la persécution était principalement le fait d’un régime totalitaire, aujourd’hui, la persécution est due à l’intégrisme islamique. Avec la guerre civile, il n’y a plus de société, chaque individu ne doit compter que sur lui-même et la pression est forte. Entre la guerre civile et l’influence grandissante des djihadistes au sein des forces d’opposition, les chrétiens sont devenus un groupe extrêmement vulnérable, soumis à des pressions liées à leur foi, dans tous les domaines de leur vie. Il s’agit d’un des pays qui a le plus grimpé dans le classement passant de la 11e à la 3e place. La guerre civile, commencée il y a deux ans, continue à faire rage, face à une communauté internationale désireuse d’intervenir sans pour autant savoir comment s’y prendre. Des villes chrétiennes telles que Homs et Alep sont devenues de véritables villes fantômes. Depuis le début de la guerre, les atrocités commises contre les chrétiens, notamment par les groupes djihadistes soutenus par l’étranger, n’ont jamais été aussi nombreuses qu’aujourd’hui. La pire attaque recensée contre les chrétiens a eu lieu le 21 octobre 2013, quand 46 chrétiens ont été massacrés par des miliciens islamistes à Sadad, une ville à majorité chrétienne. Il est également avéré que ces miliciens sont en train de déstabiliser les pays voisins tels que l’Irak (4e) ou encore la Jordanie (26e), jusque-là plutôt calme. Dans tout le Moyen-Orient, la situation se polarise davantage encore, avec un islam qui se radicalise du fait de la guerre civile en Syrie qui donne aux djihadistes un nouvel élan.

Pakistan – la pire attaque contre les chrétiens de son histoire : Depuis sa création en 1947, le Pakistan n’avait pas connu une telle attaque contre les chrétiens. Le 22 septembre 2013, 89 chrétiens ont été tués dans un double attentat suicide à la sortie de l’église catholique de Tous Les Saints (All Saints Church) à Peshawar. Si le pays accède à la 8e position dans le classement cette année, c’est aussi parce que la pression exercée sur les chrétiens par la société ne cesse d’augmenter. Le Pakistan est le pays où l’on trouve le plus d’extrémistes, et les élections qui ont eu lieu en 2013 ont montré que les principaux candidats, finalement élus au gouvernement, courtisent les talibans et les encouragent à augmenter la pression qui pèse déjà sur la minorité chrétienne. Les chrétiens pakistanais doivent faire face à de fortes contraintes dans tous les domaines de leur vie. Ils sont regardés avec suspicion et discriminés. Il est même dangereux pour eux de garder de la littérature chrétienne chez eux car ils risquent de se faire accuser de blasphème contre le prophète de l’islam ! En effet, dans ce pays, la loi sur le blasphème rend aisées ces accusations souvent formulées dans le but de régler un différend personnel. Les chrétiens doivent toujours être très prudents, et ce, à chaque instant, et ceux d’origine musulmane sont encore plus exposés car ils sont surveillés et persécutés par leur famille et leurs voisins.

Centrafrique- Entrée dans l’index : Ce pays peu connu a été catapulté à la 16e place du classement en raison des terribles violences qui ont suivi le coup d’État du mois de mars 2013, lors duquel une coalition de rebelles, la Séléka, a chassé le président au pouvoir tout en s’en prenant aux chrétiens. À présent, bien que la coalition ait été dissoute, le pays est ravagé par des seigneurs de guerre et des mercenaires venus du Tchad et du Soudan qui attaquent spécifiquement les chrétiens, violant, pillant et assassinant sans merci. Les responsables chrétiens ont tiré la sonnette d’alarme parlant d’un risque de « génocide confessionnel ». Comme le Mali l’année dernière, la Centrafrique nous montre encore comment un pays qui semblait relativement stable a pu basculer rapidement dans le chaos et comment une population chrétienne peut se retrouver brusquement aux prises avec des violences de nature génocidaires. Au Mali, même après l’intervention française qui a chassé les islamistes du pouvoir, la plupart des chrétiens n’osent toujours pas rentrer chez eux, dans le nord du Mali, et le pays occupe aujourd’hui la 33e place du classement.

Colombie et Sri Lanka — plus fortes progressions : Pour la première fois, la Colombie vient se placer parmi les 30 premiers pays du classement à la 25e place. Cette montée dans l’index est due au nombre d’enlèvements et d’assassinats qui reste très élevé dans les zones aux mains des rebelles. Si au moment de leur création, les FARC, se revendiquaient comme étant communistes, aujourd’hui il ne s’agit plus que d’une organisation criminelle qui s’adonne au trafic de drogue, et les chrétiens, qui s’opposent à leur activité de racket sont violemment pris à partie. Ces dernières années, les rebelles ont étendu leur territoire et la persécution est susceptible d’augmenter encore dans ces régions. En plus de ces groupes de rebelles, il existe d’autres organisations criminelles, sans appartenance idéologique, qui sont également actives dans le pays. Il faut noter que ce pays d’un peu plus de 44 millions d’habitants compte davantage de personnes déplacées à l’intérieur du pays (5,5 millions) que la Syrie ou le Congo. Le Sri Lanka refait son entrée dans le classement cette année. Pour la première fois, il est placé parmi les 30 premiers (29e) suite à une forte augmentation de la violence contre les chrétiens (plus de 50 attaques perpétrées contre des églises en 2013), des attaques orchestrées par un mouvement nationaliste bouddhiste véhément.

Chine — l’étau se resserre subtilement : Contrairement à l’année dernière, cette année, la Chine ne baisse pas dans le classement. Elle se maintient à la 37e place, et la manière dont elle resserre subtilement son étau sur toutes sortes d’activités religieuses inspire d’autres pays asiatiques tels que le Vietnam, qui fait son retour parmi les 20 premiers pays (18e) en raison d’un décret publié en janvier (le décret 92) qui restreint fortement les activités religieuses. L’importante Église indienne reste la proie d’un niveau de violence intense (l’Inde a légèrement grimpé à la 28e place) de la part non seulement des intégristes hindous mais également des rebelles maoïstes. En Asie du Sud-Est, la persécution se fait plus localisée et plus clandestine. Les gouvernements sont de plus en plus sournois, en introduisant de nouvelles lois qui semblent n’avoir, de prime abord, pas grand rapport avec la religion, mais qui freinent tout de même la croissance de l’Église aussi efficacement qu’une confrontation directe.

Sources Portes Ouvertes — EEMNI