Méditation

Le sens des valeurs

Quoique nous ayons fait table rase de beaucoup de symboles, ceux de la royauté par exemple, nous aimons les grandes dates, le nouvel an, l'an 2000, le troisième millénaire et bien d'autres encore. Nous en avons besoin pour vivre, ils nous rappellent des événements, ils nous permettent de célébrer le souvenir de personnes et de faits qui font ce que nous sommes. Jésus et ses disciples l'ont bien compris et même s'ils nous demandent d'adorer Dieu en Esprit et en Vérité, ils ont prévu un certain nombre de signes pour marquer la vie de l'Église et du croyant et donner du sens aux événements, ainsi la Croix du Christ donne-t-elle du sens à la cène, à la Nouvelle Naissance et au baptême du croyant.
Il faut nécessairement distinguer les signes permanents et durables de ceux qui changent sans arrêt pour tenir compte des goûts et des modes. Il en va ainsi des symboles tels ceux de France Télécom, des calendriers et des fêtes qui tiennent compte des lieux, de la culture et de la religion. Chrétiens, Juifs, Musulmans, Bouddhistes, etc... ne fêtent pas la nouvelle année en même temps et ne sont donc pas synchronisés à l'horloge du temps. Les rites tels les funérailles évoluent dans notre pays en particulier où l'incinération devient fréquente. Ces évolutions troublent les uns, questionnent d'autres sur la résurrection de leur corps. Que d'agitations et d'inquiétudes sont liées aux changements dont certains paraissent devoir nous emporter dans le tourbillon de l'accélération de l'histoire. Nous avons évoqué la crémation, nous pourrions parler du respect de la vie mis à mal par la liberté de choisir où, quand et comment on veut donner cette vie. Les manipulations génétiques qui nous font rêver, nous font peur en même temps parce qu'elles mettent à mal, avec l'euthanasie, l'image de Dieu, seul autorisé jusqu'ici à donner la vie et à la reprendre. Quelle image de Dieu donnons-nous à nos enfants, lui qui devient de plus en plus " inutile ", " archaïque " et dont les préceptes ne semblent plus adaptés et donc respectés.
Il est bon en ce début de millénaire, de se poser la question de savoir qu'est-ce qui est durable et permanent et qu'est ce qui ne l'est pas. Qu'est-ce qui est l'essentiel pour nous? La santé ? Le succès? Dieu? Ce à quoi nous nous accrochons le plus, est-ce vraiment vital ? Où sont nos valeurs? Pas celles que nous prétendons défendre, mais celles que nous défendons quotidiennement.

Ce qui fait la grandeur de l'homme (et de la femme), c'est cette liberté de décider de ce pour quoi il veut vivre. Certes on ne peut méconnaître que l'homme est conditionné par la culture, le sexe, l'éducation, les gènes, mais il est aussi libre de créer, de penser, de tuer, d'aimer. La tentation d'Adam et Eve a été de croire qu'il leur était possible de vivre une liberté totale sans réserves et sans limites alors que le Créateur leur proposait une liberté dans la soumission. Ainsi la vie devient une aventure passionnante lorsqu'elle s'inscrit dans le projet de Dieu, projet qui consiste à libérer l'homme par l'union ou la communion avec le Christ. Ce paradoxe entre le rêve toujours présent d'une liberté totale (également par rapport à Dieu), ingérable par des êtres par ailleurs limités et imparfaits, et une liberté relative dans la dépendance de Christ qui serait la vraie liberté mais dont l'homme ne veut pas, entraîne l'incompréhension et le rejet de Dieu. C'est le témoignage du croyant que de vivre la liberté de l'enfant de Dieu qui pratique l'amour d'autrui non par obligation comme si une règle ou un rite le lui imposait, mais parce que la loi de dieu est inscrite dans son être profond.
Avant de parler de l'homme, nous aurions pu parler de Dieu, c'est bien lui l'essence (tiel) qui " est " en ce début de millénaire. Il est le commencement, le présent et l'avenir, en lui sont cachées et prêtes à se révéler toutes les richesses de la grâce. Celle-ci s'identifie et se manifeste en Jésus-Christ. C'est en lui et par lui que nous avons la liberté de nous approcher de Dieu, cène et baptême nous le rappellent sans cesse. Notre témoignage ne réside pas dans l'apparente observance de lois ou de rites mais dans la recherche et l'approfondissement de l'union spirituelle avec le Christ. Tous les moyens anciens et nouveaux créés par Dieu sont utiles pour approfondir et cultiver notre relation avec lui. Rien de ce qui existe n'est a priori à rejeter, tout peut servir à la gloire de Dieu et à la construction de l'Église, si l'amour de Dieu et du prochain sont nos motivations profondes.
Liberté, tolérance et créativité sont donc de mise pour les temps qui viennent, peurs stériles de l'avenir ou du jugement sont à dépasser pour construire, dans le respect des personnes et de leurs sensibilités, une Église adaptée à son temps et à la volonté de Dieu.

Daniel OSSWALD