Le billet diaconal

"Jusqu'à la mort, accompagner la vie" par Béatrice Sigrist

Présente dans tous les médias, la question de la « fin de vie » se décline dans ses aspects les plus difficiles, suscitant interrogations et prises de positions radicales dans les débats. Pourtant des modèles de prises en charge alternatifs, parfois peu connus du grand public, existent. Présentation en dialogue avec Brigitte Grosshans, ancienne présidente du comité JALMALV de Strasbourg.


Une présence de qualité auprès des personnes en fin de vie…
Née de la réflexion d’un professeur en médecine de Grenoble et d’une équipe de personnel soignant en 1983, l’association JALMALV compte aujourd’hui 6 000 adhérents au niveau national, répartis dans une centaine d’associations sous l’égide d’une fédération.
À Strasbourg, 200 personnes poursuivent les objectifs de l’association, dont 50 d’entre elles sont « bénévoles d’accompagnement », c'est-à-dire formées à l’intervention auprès des personnes en « fin de vie ».
Cette démarche s’intègre généralement plus facilement dans des services de soins palliatifs, pourtant trop peu importants en nombre, mais se retrouve aussi dans d’autres types de structures, comme Bethesda « Arc-en-ciel » (Strasbourg) par exemple, sur la base d’une demande de la structure (ensuite conventionnée).
La formation fait partie des objectifs prioritaires de l’association, assurant ainsi la qualité du service rendu non seulement aux malades, personnes âgées, et leurs familles, mais aussi des personnels soignants des structures intégrant une démarche de ce type à leur projet d’établissement.
Changer les regards…
À côté de l’intervention « directe » auprès des malades, au sein des structures accueillantes (milieux hospitaliers, long séjour, soins à domicile), on trouve aussi un espace d’accueil et d’échange pour des personnes en deuil.
Ainsi, un groupe de réflexion sur les questions liées à la mort se rencontre 4 fois par an autour des publications de l’association, tandis que des personnes endeuillées se retrouvent (pendant un an) pour une série de 12 rencontres d’échanges et d’accompagnement en petit groupe stable, afin de ne pas « faire » leur deuil de manière isolée, en générant souvent plus de souffrance encore face à l’indicible.
Un numéro d’écoute téléphonique est mis à la disposition de toute personne souhaitant évoquer les difficultés liées à la perte d’un être cher.
Enfin, les cycles de formation sont ouverts à tous ceux qui souhaitent pour diverses raisons réfléchir au sujet, sans devenir d’emblée bénévoles d’accompagnement. Ces derniers bénéficient ensuite de modules supplémentaires pour entrer dans la pratique, ainsi que d’un suivi plus « individualisé ».
Bénévoles…
Chargée aujourd’hui de l’accompagnement de la cinquantaine de bénévoles de Strasbourg, Brigitte Grosshans, membre de l’Église Évangélique Méthodiste de Strasbourg, a été une des fondatrices de l’association en 1993 au niveau local. Présidente du comité de Strasbourg pendant 10 années, elle est venue à l’association suite à la confrontation, dans sa pratique d’infirmière en onco-hématologie, à la mort de personnes jeunes et à l’absence de réflexion et de soutien aux personnels au sein même des services concernés.
Convaincue qu’il ne s’agit pas seulement de prendre soin du corps ou de s’atteler à la résolution d’un symptôme physique précis, isolé, elle milite pour la prise en charge « globale » du patient, intégrant aussi le psychisme et la spiritualité aux soins des personnes souffrantes, ainsi que de leurs proches. Souvent les bénévoles viennent avec une idée « idéalisée » de l’accompagnement de la fin de vie. Or chacun peut et devrait s’interroger avec humilité à travers sa formation au bénévolat sur sa propre conception de la mort.
Tabous !
La mort ne fait plus tout à fait partie de la « vie » de nos contemporains occidentaux. Les rituels ont changé, l’espérance de vie crée des changements de génération plus tardifs ; on médicalise de plus en plus la fin de vie, laissant à des soignants le rôle de « présence vivante » auprès des personnes dont la flamme s’éteint doucement.
Si toutefois il existe selon Brigitte Grosshans une réelle « solitude existentielle » qui fait que chacun doit affronter ses derniers instants et le passage vers l’inconnu par lui-même, avec ses propres ressources intérieures, il y a des moments importants à partager avant que l’être aimé s’éteigne.
Brigitte Grosshans nous invite à travers ce témoignage à nous interroger face à notre propre fin et d’ainsi « intégrer la mort à la vie ». Une réflexion nécessaire dans une société aseptisée. Elle encourage aussi chacun à puiser chaque instant dans la Vie, et à « profiter de tous les bons moments » qui se présentent. 
Site de la Fédération (national) : www.jalmalv.fr
JALMALV Écoute Deuil : 03 88 22 98 56