Conseil oecuménique des Églises

« Dieu de la vie, conduis-nous vers la justice et la paix ! » (3)


Troisième et dernier volet concernant l’Assemblée générale du COE à Busan (Corée du Sud) qui s’est tenue du 30 octobre au 8 novembre 2013. La pasteure Roswitha Golder y représentait à la fois l’Association internationale de femmes ministres dans l’Église et le Forum œcuménique de femmes chrétiennes d’Europe. Ici, elle dépeint la condition des femmes en Corée du Sud, pays d’accueil de l’AG du COE avant de détailler la condition des personnes handicapées et des migrants et revient sur sa visite d’une église coréenne ordinaire ou presque…


Roswitha Golder, pasteure

En Corée

Le fait que les familles coréennes préfèrent avoir des fils produit un manque de femmes dans la population par des méthodes de planning familial néfastes. Actuellement, les femmes sont minoritaires en Corée et des agences matrimoniales s’empressent à recruter des épouses dans les pays de l’Asie du Sud. Des pasteures s’engagent dans un ministère auprès de ces immigrantes qui se sentent souvent très seules avec peu de possibilités d’intégration. Beaucoup d’entre elles n’ont guère reçu d’éducation formelle dans leur pays d’origine. Elles ont donc besoin de groupes de soutien où on leur offre des cours de langue et civilisation coréenne. Des chrétiennes coréennes disent que la violence domestique est très répandue dans leur pays ; ses épouses étrangères courent un risque accru de subir ce genre d’abus qui dans des cas extrêmes trop fréquents se soldent par un meurtre ou un suicide. La Corée est essentiellement un pays d’une seule culture et a de la peine à faire une place à ces « migrantes de mariage ».

Femmes dans l’Église et la société

En tant que représentante du Forum œcuménique des femmes chrétiennes d’Europe, j’ai rencontré quelques-unes des femmes très engagées dans cette association venues par exemple représenter les Unions chrétiennes ou encore comme déléguées de leurs églises. L’AG du COE à Busan a célébré les 60 ans du programme œcuménique des « Femmes dans l’Église et la Société ».

Lors de la Pré-assemblée des femmes, nous avons évoqué le chemin parcouru pour lequel nous rendons grâce à Dieu. La place des femmes dans nos Églises s’est améliorée même s’il reste encore beaucoup à faire pour qu’elle soit vraiment équitable.

La condition des handicapés

J’ai eu d’excellents contacts avec des hommes et des femmes engagés dans le réseau EDAN des personnes vivant avec un handicap. J’admire énormément ces hommes et ces femmes qui à Genève font partie du mouvement « Témoigner ensemble » des Églises issues de la migration et sont toujours représentés à nos activités. Le Centre de convention BEXCO, l’immense bâtiment moderne où l’AG a eu lieu, leur offrait d’excellentes conditions d’accès et de visibilité. Des volontaires coréens les ont accompagnés de manière exemplaire et ont fait que cette Assemblée soit une expérience très positive pour eux. Comme lors des AG du COE précédentes, le réseau EDAN s’est rassemblé à Busan pour deux jours de Pré-conférence de même que les peuples indigènes, représentés entre autres par Eugenio Poma, l’un des évêques antérieurs de l’Église évangélique méthodiste de Bolivie qui a travaillé au COE et a vécu pendant de longues années à Genève avec sa famille.

Un culte partagé

Le dimanche, j’ai fait partie d’un groupe de Suisses, Chinois et Italiens invités par une toute petite église presbytérienne dans un quartier près de BEXCO. Le culte nous a été traduit en anglais et Serge Fornerod et moi, les deux pasteurs dans le groupe des visiteurs, ont été invités à y prendre une part active : on m’y a confié la prière d’invocation et d’intercession ; Serge a prononcé la bénédiction. Après la prédication, il y a eu deux témoignages, celui d’un homme dont la vie a complètement changé après sa conversion au Christ et celui d’une jeune femme qui nous a raconté comment sa foi en Jésus et l’appui de la communauté l’ont aidé à surmonter une dépression. Elle semblait avoir beaucoup souffert sous la pression de la part de son entourage familial pour réussir ses études et mener une vie exemplaire. Les jeunes étaient en majorité dans cette église : une chorale constituée par eux animait les chants. Je ne sais pas si nos hôtes les avaient choisis ainsi à cause de notre présence, mais il s’agissait presque exclusivement de mélodies qui nous sont familières et nous avons donc pu chanter de tout cœur avec l’assemblée d’une quarantaine de personnes.

    Les 60 membres de cette église provenant de différents quartiers de Busan non seulement payent le salaire de leur pasteur, mais ils réunissent CHF 2.500. — de loyer par mois pour les deux espaces qu’ils utilisent dans un gratte-ciel : une salle de réunion où ils célèbrent leurs cultes, deux cultes chaque dimanche, et une salle à manger avec cuisine qui sert aussi de salle pour les activités des enfants, l’école du dimanche etc. Ils sont aussi propriétaires du minibus qui nous a véhiculés. Notre chauffeur était un ingénieur, converti du bouddhisme, marié à une chrétienne de deuxième génération, professeure de chimie à l’Université. Il est venu nous chercher à 10 heures du matin pour le deuxième culte qui commence à 11 h 15 et nous a d’abord donné un tour le long de la côte avec un arrêt au Centre APEC, un bâtiment impressionnant, une sorte de musée, construit spécialement pour la réunion que cette organisation a tenue à Busan (en 2005 ?) dans un très beau parc situé sur ce qu’on dit être la plus belle plage du pays. J’ai d’ailleurs eu le privilège de pouvoir y admirer le lever du soleil chaque matin depuis ma chambre d’hôtel tout près de ce parc.

Après le culte, la communauté se réunit toujours pour un repas communautaire apporté par les membres. La plupart d’entre eux se sont regroupés autour de tables basses et étaient assis par terre sur leurs genoux. J’ai beaucoup apprécié qu’on nous ait offert des chaises, une table « normale », et des fourchettes pour pouvoir manger le grand choix de spécialités coréennes délicieuses. J’ai de la peine à manger à la manière asiatique avec des baguettes.

La communauté est dirigée de manière peu « presbytérienne », car le pasteur et son assistant qui porte le titre de missionnaire en sont les seuls responsables. Absence totale de « collège des anciens » voire « conseil de paroisse » qui permettrait de prendre des décisions de manière démocratique. Cela nous a étonnés, mais ne semblait pas être exceptionnel dans l’Église presbytérienne coréenne, PCK. C’est la plus grande Église presbytérienne du pays, de tendance plutôt conservatrice. Elle est membre du COE avec l’Église presbytérienne de la République de Corée (PCROK) marquée par une théologie plus progressiste, engagée dans des mouvements sociaux. Il y a encore deux autres Églises coréennes membres du COE en Corée, dont la méthodiste, également une des Églises importantes dans le pays.