La vie de l’Église (2)

Accord historique : code de bonne conduite en matière de mission et d’évangélisation

Une première depuis la Réforme, les trois principales institutions chrétiennes mondiales, le Conseil Œcuménique des Églises, l’Alliance évangélique mondiale et le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux s’accordent sur un « code de bonne conduite » pour la mission et l’évangélisation.


Un événement précédent

Le Conseil Œcuménique des Églises (COE) a présenté mardi 28 juin un texte qualifié d’historique et intitulé « Témoignage chrétien dans un monde multireligieux : recommandations pour un code de conduite ». Ce document est le fruit de cinq années de dialogue et de réflexion commune entre le Conseil Œcuménique des Églises, l’

 évangélique mondiale et le Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux : le projet qui a commencé en 2006 a fait l’objet de plusieurs réunions préparatoires. La première s’est déroulée à l’Ariano, en Italie, en mai 2006, une rencontre à laquelle participèrent également des représentants des autres religions, musulmans, juifs et bouddhistes et hindouistes. La deuxième s’est tenue à Toulouse en août 2007, et la troisième a eu lieu à Bangkok en janvier dernier.

« Ce texte est historique », a déclaré Geoff Tunicliffe, secrétaire général de l’Alliance évangélique mondiale. « C’est en effet la première fois depuis le XVIe siècle que l’ensemble des représentants du monde chrétien adoptent un document conjoint, aboutissant à des recommandations concrètes à l’attention de leurs membres ».

Mission : des paroles et des actes

« La mission fait partie de l’essence même de l’Église » et « la proclamation de la Parole de Dieu ainsi que le témoignage au monde sont essentiels pour chaque chrétien » 1, rappelle d’emblée le document.

La transmission de la parole de Dieu fait partie intégrante de la mission, mais aussi les services sociaux, tels que l’éducation, les soins de santé ou encore l’aide humanitaire : « le témoignage chrétien prend la forme de l’annonce du Royaume, du service du prochain et du don total de soi, même si cela doit conduire à la croix » et, dans un monde pluraliste, il « inclut l’engagement dans le dialogue » avec les différentes religions et cultures.

Dialogue, respect et amour

Le document propose des recommandations éthiques pour aider les chrétiens à parler de leur foi dans un esprit de dialogue, de respect et d’amour, à l’exemple de Jésus-Christ, « le Témoin suprême ». Les chrétiens qui veulent témoigner de Jésus-Christ doivent « agir dans l’amour de Dieu, imiter Jésus-Christ et pratiquer les vertus chrétiennes ». Ils doivent aussi poser des « actes de service et de justice », à travers l’éducation, les soins de santé et la dénonciation des situations de pauvreté, et s’abstenir « d’offrir des récompenses financières dans leurs actes de service ».

Non aux déviations

Le document dénonce fermement l’exploitation de la pauvreté ou de la faiblesse d’autrui et rejette de même toute forme de violence ou de contrainte.

Confiance, réconciliation et coopération

Le document souligne enfin « la liberté de religion et de croyance », l’importance de respecter les autres cultures et de cultiver le dialogue avec ceux qui ont une croyance différente : « le chrétien doit construire des relations interreligieuses », afin de faciliter « compréhension mutuelle plus profonde, réconciliation et coopération au bien commun ».

Le témoignage chrétien appelle à l’édification de la confiance et de la coopération entre les fidèles de toutes les religions et à la promotion de la liberté religieuse partout dans le monde.

Sans manipulation ni excès

Le document dénonce toute instrumentalisation de la religion à des fins politiques : « Là où une religion est manipulée à des fins politiques ou dans les cas de persécution religieuse, les chrétiens sont appelés à s’engager dans un témoignage prophétique en dénonçant de telles actions. »

Les chrétiens sont encouragés à prier pour le bien-être de toutes et tous, à renforcer leur propre identité religieuse et à veiller à ne pas se faire une représentation erronée des croyances d’autrui. Ils doivent « renoncer au faux témoignage » à propos des autres religions et s’exprimer avec sincérité et respect, notamment s’ils émettent un commentaire ou une approche critique. Ils doivent encore « garantir le discernement personnel », en cas de conversion, le fait de changer de religion devant être « accompagné d’un temps suffisant et préparé de manière ajustée ».

Si possible, lit-on également, l’élaboration de codes de conduite par les Églises et organisations liées « devrait se faire de manière œcuménique et en consultation avec des représentants d’autres religions. »

Accueil enthousiaste

Le Réseau évangélique suisse (SEA×RES) se réjouit que les trois principales institutions chrétiennes affirment l’importance de la mission et la proclamation de l’Évangile dans le mandat de l’Église universelle. Il soutient l’idée que l’évangélisation doit se faire en respectant la liberté religieuse de chacun.

De son côté, le cardinal Jean-Louis Tauran, président du CPDI, a fait remarquer que les responsables d’Église ont aujourd’hui « une obligation de proclamer la foi » et de « proposer une vision plus large du dialogue. » Il a cité un principe de l’enseignement catholique : « Ne rien rejeter qui soit vrai et saint quelle que soit la religion » en invitant les chrétiens à surmonter les conflits religieux s’ils veulent « présenter la vérité de Dieu de façon crédible. »

En présentant « Le témoignage chrétien dans un monde multireligieux », le pasteur Tveit a évoqué la prière pour l’unité de Jésus-Christ dans le chapitre 17 de l’Évangile de Jean. « Nous sommes appelés à être un afin que le monde croie », a déclaré le secrétaire général du COE. « C’est pourquoi ce jour est une journée pour rendre grâce, une journée de célébration, mais aussi une journée de réflexion. »

1] « Missions belongs to the very being of the church. Proclaiming the word of God and witnessing to the world is essential for every Christian ». (Preamble)

Source : La croix/Christianisme aujourd’hui/Radio Vatican/RES/APIC/COE/EEMNI

Légende de la photo : Le cardinal Jean-Louis Tauran, président du Conseil pontifical pour le dialogue interreligieux, le pasteur Olav Fykse Tveit, secrétaire général du COE, et le pasteur Geoff Tunnicliffe, secrétaire général de l’Alliance évangélique mondiale, au siège du COE, mardi 28 juin (photo COE).